Genre : fantastique (interdit aux - 12 ans)
Année : 1990
Durée : 1h35
Synopsis : Peyton Westlake, brillant généticien, vient de réaliser la synthèse des cellules de la peau. Sa femme, avocate, a pour client un constructeur immobilier, Louis Strack Jr, dont un document confidentiel vient de lui révéler les agissements douteux. Elle cache le document dans le laboratoire de son mari. Louis Strack Jr envoie des tueurs pour récupérer son bien. Le professeur est laissé pour mort mais il survit a ses horribles blessures. Défiguré, il réussit à se recomposer un visage, mais qui ne tient qu'une heure, afin d'assouvir sa vengeance.
La critique :
La carrière cinématographique de Sam Raimi débute vers le milieu des années 1970 via plusieurs courts-métrages. Par exemple, It's Murder (1977) et Within the Woods (1978) lui permettent de se distinguer dans le petit univers étriqué du Septième Art. Durant ses études à l'université, Sam Raimi s'accointe et s'acoquine avec Bruce Campbell, qui va devenir son acteur fétiche par la suite.
Puis, dès 1981, avec Evil Dead, son tout premier long-métrage, le cinéaste américain se retrouve propulsé au sommet de la gloire et de la notoriété. Malgré son budget famélique, Evil Dead devient le nouveau parangon du cinéma bis horrifique. La recette ? De la sorcellerie, un livre (le Necronomicon) démoniaque, des morts-vivants putrescents et de nombreuses séquences cartoonesques.
Sam Raimi confirme avec ses deux longs-métrages suivants, le trop méconnu Mort sur le Grill (1985) et surtout Evil Dead 2 (1987). Passionné par les comics et l'univers des super-héros, le réalisateur s'attelle à l'adaptation d'un nouvel épisode de Batman au cinéma. Mais le projet est déjà confié à Tim Burton, un autre érudit du noble Septième Art. Qu'à cela ne tienne, pugnace, Sam Raimi décide de créer son propre personnage de comics. Ce sera Darkman, sorti en 1990.
Le film est censé lui ouvrir les portes des studios hollywoodiens. Le cinéaste souhaite réaliser un film fantastique très éloigné des productions habituelles. Peyton Westlake, alias Darkman, doit se situer aux antipodes de Bruce Wayne et de Peter Parker.
Ce nouveau super-héros doit être à la fois un mélange entre le Fantôme de l'Opéra et ce vengeur moderne, s'accaparant le visage de ses adversaires. Certes, le film doit composer avec un modeste budget (à peine 16 millions de dollars), confinant cette production à une modeste série B. Pourtant, Darkman se solde par un succès commercial aux Etats-Unis. Mieux, les critiques et la presse se montrent unanimement panégyriques. Pour le scénario du film, Sam Raimi s'adjoint les services de plusieurs cacographes, notamment Chuck Pfarrer, Ivan Raimi (le frère du réalisateur), Daniel et Joshua Goldin.
Danny Elfman compose la bande originale du film. Le long-métrage s'octroie même plusieurs récompenses, entre autres, le prix du meilleur réalisateur et des meilleurs effets spéciaux lors du festival international du film de Catalogne.
La distribution de Darkman réunit Liam Neeson, Frances McDormand, Colin Friels, Larry Drake, Ted Raimi, Nelson Mashita et Raphael H. Robledo. Viennent également s'ajouter le réalisateur John Landis (dans le rôle d'un médicastre) et Bruce Campbell qui apparaît furtivement lors de la conclusion finale. Pour la petite anecdote, le rôle de Louis Strack Jr., finalement tenu par Colin Friels, sera proposé à James Caan et Richard Dreyfuss. Mais les deux acteurs déclineront poliment l'invitation.
Attention, SPOILERS ! Peyton Westlake, brillant généticien, vient de réaliser la synthèse des cellules de la peau. Sa femme, avocate, a pour client un constructeur immobilier, Louis Strack Jr, dont un document confidentiel vient de lui révéler les agissements douteux. Elle cache le document dans le laboratoire de son mari.
Louis Strack Jr envoie des tueurs pour récupérer son bien. Le professeur est laissé pour mort mais il survit à ses horribles blessures. Défiguré, il réussit à se recomposer un visage, mais qui ne tient qu'une heure, afin d'assouvir sa vengeance. La sortie de Darkman préfigure déjà les prémisses du scénario de Spider-Man. Si les deux super-héros sont très différents, ils annoncent déjà l'avènement des super-héros au cinéma à partir du début des années 2000.
En l'occurrence, Darkman se voit heureusement privé du diktat et du carcan hollywoodiens. Ce qui explique probablement sa nonchalance, sa folie et son outrecuidance. Ainsi, le film fonctionne quasiment comme une bande dessinée qui se déploie sous le regard ébaubi du spectateur : un savant atrocement défiguré suite à l'explosion de son laboratoire, une caméra qui nous convie dans la psyché en plein marasme de Peyton Westlake, un vil promoteur immobilier et une romance amoureuse en filigrane.
Telle est la formule ânonnée par un Sam Raimi plus sagace que jamais. En dépit d'un budget impécunieux, Sam Raimi fait preuve d'ingéniosité et s'approprie l'univers de son super-héros. En outre, Darkman ne sera pas une sorte de demi-dieu auréolé de super pouvoirs ou d'un costume érubescent et corseté. Le visage hideux et tuméfié, Peyton Westlake doit revêtir les oripeaux de la plèbe avec son chapeau et un visage presque entièrement bandé.
Toutefois, gare à ne pas émoustiller ce "Fantôme de l'Opéra" des temps modernes ! Visiblement, Sam Raimi s'est beaucoup inspiré des films (donc Le Fantôme de l'Opéra, au cas où vous n'auriez pas compris...) de 1925 et de 1943 réalisés (respectivement) par Rupert Julian et Arthur Lubin.
Dans Darkman, on retrouve également cet attrait pour cet homme en désuétude et obnubilé par sa quête de vengeance. Mutin, Sam Raimi ne mise pas vraiment sur l'avalanche d'effets spéciaux et de conflagrations ad nauseam. Le cinéaste mise davantage sur la neurasthénie mentale de son principal protagoniste. Sam Raimi dissémine, ici et là, plusieurs saynètes élusives conviant le spectateur à scruter la psyché de Peyton Westlake. C'est par exemple le cas lors la séquence se déroulant dans une fête foraine.
Ainsi, Darkman devient un phénomène de foire, provoquant ainsi l'ire de ce super-héros conspué et répudié par la société. Désormais, Peyton Westlake est mort et enterré, comme il le claironne à sa future épouse. Par certains aspects, Darkman s'apparente parfois à une longue complainte funéraire. Néanmoins, Sam Raimi n'oublie pas les inimitiés et propose plusieurs scènes d'action savamment troussées, à l'image de cette course poursuite en hélicoptère.
Mais Darkman, c'est aussi un monde érigé et dirigé par de vils promoteurs immobiliers qui détiennent la pécune et le capital. Dans cette noirceur insondable, Darkman semble condamné à se noyer parmi la populace. Un propos corroboré par le super-héros lors de son allocution finale : "Je suis tout le monde et personne... Je suis partout et nulle part... Appelez-moi Darkman !".
Note : 16/20