Genre : Policier / Suspense (interdit aux - 12 ans)
Année : 1984
Durée : 1h40
Synopsis : Un gangster américain, traqué par la police française à la suite d'un hold-up sanglant, vient se réfugier dans une ferme occupée par une famille loin d'être tranquille.
La critique :
Attention, voici un véritable O.F.N.I en provenance direct de notre beau pays français, j'ai nommé Canicule. La chose étant suffisamment rare pour être soulignée. Adaptation d'un roman de Jean Vautrin, qui officie ici comme scénariste, Canicule peut en premier lieu se targuer d'aligner un générique apte à en faire baver plus d'un. Jugez plutôt : Michel Audiard au dialogues, Francis Lai à la musique, Yves Boisset à la réalisation et devant la caméra : Lee Marvin, Victor Lanoux, Bernadette Lafont, Henri Guybet, Jean-Pierre Kalfon, Jean Carmet, Jean-Claude Dreyfuss, Grace De Capitani et Miou-Miou ; le tout pour une oeuvre mélangeant le polar, le suspense et le drame psychologique.
A cela, s'ajoute une bonne dose de violence à outrance et de mauvais goût.
Fidèle à lui-même, Yves Boisset choisit d'aller au bout de son sujet, quitte à choquer, ce qui ne manquera pas d'arriver lors de la sortie du film qui provoquera un scandale. Encore aujourd'hui, Canicule continue de diviser, certains le qualifiant de gros navet honteux, tandis que d'autres crient au chef d'oeuvre. Si je n'irais pas jusque-là, je considère que le film d'Yves Boisset est loin d'être aussi mauvais que certains le disent. Pour l'anecdote, le réalisateur affirmera plus tard, dans une interview, considérer ce film comme son meilleur long-métrage.
Il révélera également une anecdote amusante. Durant le tournage, Lee Marvin et Jean Carmet sympathisèrent rapidement au point d'avoir de longues discussions. Sauf qu'aucun des deux ne parlait correctement la langue de l'autre.
L'histoire de Canicule tourne autour de Jimmy Cobb, un gangster Américain, qui organise un hold-up en France. Mais les choses se passent mal et la police débarque tandis que le gangster découvre qu'il a été trahi par un de ses complices. S'ensuit une fusillade brutale à l'issue de laquelle Jimmy Cobb est contraint de prendre la fuite. Poursuivi par toutes les polices, l'homme est contraint de cacher son magot dans un champ avant de se réfugier dans la grange d'une ferme toute proche.
Il ignore que l'endroit cache une famille de fermiers complètement à la masse et que sa présence va provoquer des conséquences qu'il est loin d'imaginer. Dès la première scène, Yves Boisset a le mérite d'annoncer la couleur, puisqu'on y voit un gamin se prendre une balle en plein coeur et s'écrouler au milieu d'une fusillade sanglante.
Encore une fois, le réalisateur montre qu'il ne s'est fixé aucun tabou, puisque la mort d'un enfant est une image généralement bannie au cinéma. Pourtant, ce n'est rien par rapport à ce qui va suivre, car Jimmy Cobb atterrit dans une famille de péquenots qui, s'ils n'ont rien à voir avec des psychopathes du style Massacre A La Tronçonneuse, n'en sont pas moins sévèrement atteints. Entre la nymphomane en puissance (incarnée par une Bernadette Lafont hystérique), l'obsédé sexuel (Victor Lanoux qui se déguise en épouvantail dans son champ pour espionner deux campeuses), Miou-Miou en épouse frigide et revancharde de ce dernier (et qui se tripote en entendant les gémissements de la nymphomane), l'alcoolique qui tient un garage dans une région où personne ne passe jamais, et le gosse qui se croit constamment dans un film de gangsters (il n'hésite pas à aller voir des prostituées avec de l'argent piqué à Jimmy Cobb), on peut dire que le truand est tombé dans un sacré guêpier.
Et je n'ai pas parlé de la vieille servante folle se contentant de dire qu'elle ne veut pas aller dans une maison de vieux, ni des personnages en dehors de la famille comme celui incarné par Jean-Claude Dreyfuss, capitaine de gendarmerie un peu dépassé et un peu candide (il faut l'entendre expliquer le plus sérieusement du monde qu'un policier a été retrouvé mort le pantalon baissé, et que c'est probablement Jimmy Cobb qui l'a sodomisé avant de le tuer).
Quant à Henri Guybet, sa prestation en jeune gendarme inexpérimenté est courte, mais vaut tout même le détour. Seul le personnage de Grace De Capitani demeure finalement anecdotique et pas indispensable, l'actrice se contentant de jouer à nouveau un rôle de prostituée (dont les dialogues avec Jean Carmet, sont un vrai bonheur). Finalement, dans ce tableau, on regrettera que Lee Marvin paraisse aussi absent, l'acteur interprétant son rôle sans grande conviction.
Vous l'aurez compris. Avec Canicule, Yves Boisset et son équipe carburent encore une fois au mauvais goût et brossent le portrait de personnages tous ignobles, égoïstes, cupides, méchants et capables du pire. Autant dire un portrait peu reluisant de l'être humain. Le réalisateur en profite également pour s'en prendre à la médiatisation à outrance (Jimmy Cobb est considéré comme une légende alors que certains de ses exploits paraissent un peu exagérés).
Magnifiquement réalisé, Canicule reste un film très particulier, porté par un casting flamboyant. Une oeuvre singulière et qui, encore une fois, ne plaira pas à tout le monde.
Note : 17/20