Genre : horreur, épouvante (interdit aux - 12 ans)
Année : 2017
Durée : 2h15
Synopsis : À Derry, dans le Maine, sept gamins ayant du mal à s'intégrer se sont regroupés au sein du "Club des Ratés". Rejetés par leurs camarades, ils sont les cibles favorites des gros durs de l'école. Ils ont aussi en commun d'avoir éprouvé leur plus grande terreur face à un terrible prédateur métamorphe qu'ils appellent "Ça"… Car depuis toujours, Derry est en proie à une créature qui émerge des égouts tous les 27 ans pour se nourrir des terreurs de ses victimes de choix : les enfants. Bien décidés à rester soudés, les Ratés tentent de surmonter leurs peurs pour enrayer un nouveau cycle meurtrier. Un cycle qui a commencé un jour de pluie lorsqu'un petit garçon poursuivant son bateau en papier s'est retrouvé face-à-face avec le Clown Grippe-Sou…
La critique :
Souvenez-vous, c'était en 1990. Tommy Lee Wallace adaptait, via une mini-série télévisée en deux parties, le célèbre opuscule de Stephen King, Ca. Contre toute attente, cette adaptation remporte un succès colossal lors de sa diffusion à la télévision, suscitant de nombreuses tintinnabulations et des cris d'orfraie. Sous l'aval de Tommy Lee Wallace, le clown démoniaque de "Il" est revenu, un certain Grippe-Sou, devient une nouvelle figure mythique d'effroi, de terreur et d'épouvante.
Le clown au sourire narquois et angélique s'inscrit rapidement dans la culture populaire américaine. Pour l'anecdote, Stephen King avoue s'être inspiré, pour ce personnage méphistophélique, d'un célèbre tueur en série américain, John Wayne Gacy Jr. Le sociopathe se grimait parfois en clown ou en saltimbanque pour appâter ses proies ou les enfants lors de ses visites récurrentes à l'hôpital.
De surcroît, le téléfilm de 1990 peut s'appuyer sur l'extraordinaire composition d'un Tim Curry sarcastique et qui vient prêter ses traits à cette créature surgie des ténèbres. A l'instar de Leatherface, de Michael Myers et de Freddy Krueger, Grippe-Sou fait partie de ces boogeymen qui ont marqué plusieurs générations de jeunes éphèbes indociles. Cependant, la version de Tommy Lee Wallace n'était pas exempte de tout reproche, en raison essentiellement d'une seconde partie en demi-teinte, et d'effets spéciaux surannés ; confinant le téléfilm dans une conclusion ubuesque.
Dès 2009, la Warner Bros souhaite adapter derechef le roman de Stephen King via un long-métrage cinématographique et non plus sous la forme d'une mini-série et/ou d'un téléfilm. Le projet est plusieurs fois prorogé.
En 2012, la Warner Bros annonce que l'adaptation prendra la forme d'un diptyque, le premier chapitre se polarisant sur l'enfance des protagonistes, et la seconde sur l'âge adulte. Pour des raisons essentiellement techniques et après de nombreux atermoiements, l'adaptation cinématographique échappe à la Warner Bros et échoue entre les mains de New Line Cinema. Les producteurs font alors appel aux soins et à l'érudition d'Andrès Muschietti pour réaliser Ca, sorti en 2017, et actuellement dans les salles de cinéma. Pour l'anecdote, le cinéaste a déjà signé Mama (2013), un long-métrage d'épouvante qui s'est illustré au festival du film fantastique de Gérardmer.
Studieux, Andrès Muschietti s'attelle à la tâche, relit doctement et plusieurs fois le célèbre opuscule de Stephen King, se délecte des légendes urbaines américaines, et vient même renâcler du côté de Freddy Krueger et de son emprise sur Elm Street.
Andrès Muschietti a parfaitement cerné la genèse et la quintessence de Grippe-Sou, ce clown luciférien. A l'instar de Freddy Krueger, lui aussi se nourrit des peurs et des angoisses archaïques de jeunes éphèbes terrorisés par le noir, le vide et cette menace provenant d'un néant indicible. En l'état, Ca version 2017 n'est pas vraiment un remake, mais fait office de nouvelle adaptation cinématographique, le but étant d'extirper le téléfilm des années 1990 d'une certaine caducité.
Mission réussie en l'occurrence. A peine sorti aux Etats-Unis, Ca (le film) remporte un succès colossal. Les spectateurs se précipitent dans les salles. Mieux, les critiques se montrent unanimement panégyriques et parlent déjà du meilleur film horrifique de l'année 2017, supplantant allègrement la mini-série de 1990. Reste à savoir si Ca mérite un tel dithyrambe.
Réponse dans les lignes à venir... La distribution du long-métrage se compose de Bill Skarsgard, Jaeden Lieberher, Jeremy Ray Taylor, Sophia Lillis, Finn Wolfhard, Wyatt Olef, Chosen Jacobs, Nicholas Hamilton et Jack Dylan Grazer. Attention, SPOILERS ! À Derry, dans le Maine, sept gamins ayant du mal à s'intégrer se sont regroupés au sein du "Club des Ratés". Rejetés par leurs camarades, ils sont les cibles favorites des gros durs de l'école. Ils ont aussi en commun d'avoir éprouvé leur plus grande terreur face à un terrible prédateur métamorphe qu'ils appellent "Ça"…
Car depuis toujours, Derry est en proie à une créature qui émerge des égouts tous les 27 ans pour se nourrir des terreurs de ses victimes de choix : les enfants. Bien décidés à rester soudés, les Ratés tentent de surmonter leurs peurs pour enrayer un nouveau cycle meurtrier.
Un cycle qui a commencé un jour de pluie lorsqu'un petit garçon poursuivant son bateau en papier s'est retrouvé face-à-face avec le Clown Grippe-Sou… Que les thuriféraires de l'opuscule originel se rassurent. Non seulement Ca (le film) respecte les grandes lignes du roman de Stephen King, mais il surclasse la version - il est vrai désuète - réalisée par les soins de Tommy Lee Wallace. Mutin, Andrès Muschietti plante d'emblée le décor et la tragédie à venir, à savoir la disparition de Georgie, un jeune bambin dévoré par un Grippe-Sou sardonique. Ce drame poursuit inlassablement la ville de Derry, d'autant plus que les disparitions d'enfants s'accumulent. A travers cette introduction à la précision clinique et chirurgicale, Andrès Muschietti s'approprie et réinvente le croquemitaine.
Jamais, un boogeyman ne sera autant apparenté à un nouvel avatar de Freddy Krueger.
D'ailleurs, Andrès Muschietti dissémine ici et là plusieurs indices (en particulier des oriflammes) élusifs affichant clairement le faciès comminatoire de cette créature onirique. Mais Ca, c'est aussi une ville gangrénée par le mal et la violence. Le clown machiavélique ne se nourrit pas seulement de nos fêlures, mais aussi de notre perniciosité et de notre pusillanimité. A l'image de cette mère débonnaire qui claustre son jeune gosse dans sa masure, ou de ce père incestueux qui tarabuste sa propre fille. Le mal n'est pas seulement incarné par un Grippe-Sou goguenard, mais également par les habitants poltrons d'une petite communauté. Pour vaincre ce clown démoniaque, Bill Denbrough et sa bande de ratés ne pourront pas s'appuyer sur la police, encore moins sur la couardise de leurs parents.
Ca, c'est aussi (et encore...) cette dichotomie entre deux générations antagonistes, celle qui a connu la révolution sociale et culturelle des années 1970 et celle qui deviendra la nouvelle armée de réserve du capitalisme ; Ca se nourrissant justement de notre hédonisme.
Et c'est ce qu'a parfaitement compris Andrès Muschietti. Indubitablement, cette version cinématographique recèle de qualités évidentes. Bill Skarsgard, qui remplace Tim Curry, incarne un clown à la fois terrifiant et jubilatoire. Les peurs enfantines (l'acrophobie, l'achluophobie et évidemment la coulrophobie) sont judicieusement exploitées, non sans céder parfois à une certaine facilité, Andrès Muschietti n'hésitant pas à renâcler du côté du paranormal version James Wan et autres Conjuring. In fine, nonobstant sa fidélité au roman, Ca (le film) n'est pas non plus la terreur décriée par certains spectateurs médusés, et encore moins le chef d'oeuvre horrifique érigé par une certaine presse spécialisée.
En l'état, Ca s'avère être une adaptation de qualité et qui trouvera son point culminant lors de sa dernière demi-heure en apothéose. En résulte un film d'épouvante parfois un peu trop policé, mais tout à fait probe, honorable et recommandable. En ces temps de disette horrifique, c'est déjà énorme.
Note : 14.5/20