Genre : horreur, gore (interdit aux - 16 ans)
Année : 1985
Durée : 1h44
Synopsis : Invités à l'avant-première d'un film d'horreur, des spectateurs sont contaminés par des effluves maléfiques.
La critique :
Réalisateur et scénariste italien, Lamberto Bava est évidemment le fils prodige de Mario Bava. C'est d'ailleurs avec son propre patriarche et tant qu'assistant-réalisateur que Lamberto Bava débute sa carrière cinématographique. Il contribue et participe ainsi aux tournages d'Opération Peur (1966), Danger : Diabolik ! (1968), Une Hache pour la Lune de Miel (1970), ou encore La Maison de l'Exorcisme (1975) avec son paternel. Parallèlement, le cinéaste transalpin collabore avec Dario Argento (Ténèbres en 1982 et Inferno en 1980) et officie également pour la télévision, notamment pour la série La Caverne de la Rose d'Or entre 1991 et 1996.
C'est à partir de 1980 que Lamberto Bava signe son tout premier long-métrage, Baiser Macabre, par ailleurs injustement méconnu.
Auréolé par l'influence et le style cinématographique de son patriarche, Lamberto Bava s'ingénie dans les registres horrifiques et fantastiques. On lui doit, entre autres, La Maison de la Terreur (1983), Le Monstre de l'Océan Rouge (1984), Midnight Horror (1985), ou encore Delirium (1987). Vient également s'ajouter Démons, sorti en 1985, et qui reste probablement le métrage le plus proverbial du cinéaste italien. Sur la forme comme sur le fond, le film est une sorte de juxtaposition entre La Nuit des Morts-Vivants (George A. Romero, 1968) pour son style âpre et brute de décoffrage et Evil Dead (Sam Raimi, 1981) pour son côté foutraque, pittoresque et volontairement outrancier.
Démons est aussi réalisé vers le milieu des années 1980, une époque qui voit le même George A. Romero en déliquescence.
Sa trilogie des Morts, justement amorcée par La Nuit des Morts-Vivants (déjà précitée) et poursuivie par Zombie (1978), se conclut de façon timorée avec Le Jour des Morts-Vivants (1985). Contre toute attente, le public tance et ostracise ce troisième chapitre qu'il juge beaucoup trop redondant. Parallèlement, Le Jour des Morts-Vivants souffre de la concurrence pléthorique et notamment de la sortie de Le Retour des Morts-Vivants (Dan O'Bannon, 1985), qui brille surtout par sa nonchalance, sa fougue et son irrévérence. Une didactique qui n'échappe pas à Lamberto Bava qui souhaite réaliser un grand film de zombie, tout en renouvelant un genre en pleine décrépitude.
Pour diligenter les opérations, le cinéaste s'adjoint les services et l'érudition de Dario Argento, de Dardano Sacchetti et de Franco Ferrini pour le scénario du film, de Michel Soavini en tant qu'assistant-réalisateur et enfin, de Sergio Stivaletti pour les maquillages et les effets spéciaux.
Démons se solde donc par un succès colossal lors de sa sortie sur le territoire italien. De surcroît, ce succès phénoménal s'exporte au-delà des frontières transalpines. Le long-métrage devient même le nouvel apanage du genre horrifique. Les critiques et la presse cinéma se montrent unanimement panégyriques et évoquent déjà un film culte en devenir. Reste à savoir si Démons mérite de tels dithyrambes. Réponse dans les lignes à venir... Opportuniste, Lamberto Bava réalisera un Démons 2 en 1986.
Cette suite sera suivie par un inévitable troisième chapitre, Demoni 3 (Umberto Lenzi, 1991) qui, par ailleurs, n'entretient plus aucune connivence avec ses deux augustes épigones. La distribution de ce premier volet réunit Urbano Barbareni, Natasha Hovey, Karl Zinny, Fiore Argento (la fille de Dario), Paola Cozzo et Fabiola Toledo.
Attention, SPOILERS ! (1) Un nouveau film d'horreur, Métropol, arrive en salles. Il s'agit d'un film surnaturel. Quelques amis se réunissent pour le regarder. Mais à peine les quinze premières minutes passées, qu'une jeune femme est attaquée dans les toilettes. Dès lors, une transformation la change violemment en démon - tout comme dans le film projeté - et l'infection se propage... tout comme le massacre. Et tout devient pire quand les spectateurs découvrent que les issues sont mystérieusement bloquées... (1) En l'occurrence, Démons rompt littéralement avec la logique ânonnée par Le Jour des Morts-Vivants. A l'inverse de George A. Romero, Lamberto Bava et ses fidèles prosélytes refusent de psalmodier le moindre discours emphatique, politique et idéologique à travers cette pellicule décérébrée.
Pourtant, dans sa seconde partie en forme de huis clos anxiogène et oppressif, Démons n'est pas sans rappeler, par certaines accointances, La Nuit des Morts-Vivants. Là aussi, les protagonistes sont cloîtrés et condamnés à lutter contre des forces méphistophéliques qui les dépassent. En outre, pas question ici de s'appesantir sur les divers protagonistes. En l'état, le héros principal du film, un certain George, n'est qu'un avatar d'Ash Williams dans la saga Evil Dead.
Lui aussi massacre et étrille des morts-vivants avec une étonnante dextérité. Même physiquement, les deux interprètes - Urbano Barberini et Bruce Campbell - se ressemblent. Toutefois, attention à ne pas résumer Démons à un énième succédané du film de Sam Raimi. En l'occurrence, le long-métrage possède son propre style en proposant "un film dans le film", un procédé novateur qui a le mérite de plonger le spectateur en immersion et au coeur de la terreur.
Il est donc question ici d'une malédiction luciférienne qui s'empare peu à peu des spectateurs d'une salle de cinéma. La moindre morsure ou griffure engendre presque instantanément une sorte de métempsychose à caractère démoniaque. Dès lors, Lamberto Bava se permet toutes les excentricités et nous gratifie de saynètes outrageantes et érubescentes, n'hésitant pas à verser complaisamment dans le gore. Démons n'a donc pas usurpé son interdiction aux moins de 16 ans.
Ensuite, force est de constater que le long-métrage a plutôt bien traversé le poids des années. Les maquillages et les effets spéciaux, prodigués par les soins de Sergio Stivaletti, sont les principaux atouts du film. A l'instar d'Evil Dead et de The Return of the Living Dead, Démons opte lui aussi pour un humour truculent et une tension quasi permanente. La grande force du long-métrage repose essentiellement sur cette salle de cinéma transformée en antre de l'horreur.
Un procédé qui imprégnera largement Jaume Balaguero et Marco Plazza pour Rec (2007) premier du nom, à la seule différence que la salle de cinéma se transmutera en immeuble assiégée par des policiers. De leur propre aveu, le scénario de Démons reste la source principale d'inspiration pour cette nouvelle aventure cauchemardesque. Vous l'avez donc compris. Démons n'a pas à rougir de la comparaison avec les grands classiques "zombiesques". Bref, en deux mots, un indispensable !
Note : 15/20
(1) Synopsis du film sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mons_(film,_1985)