Genre : science-fiction
Année : 2016
Durée : 1h56
Synopsis : Lorsque de mystérieux vaisseaux venus du fond de l’espace surgissent un peu partout sur Terre, une équipe d’experts est rassemblée sous la direction de la linguiste Louise Banks afin de tenter de comprendre leurs intentions. Face à l’énigme que constituent leur présence et leurs messages mystérieux, les réactions dans le monde sont extrêmes et l’humanité se retrouve bientôt au bord d’une guerre absolue. Louise Banks et son équipe n’ont que très peu de temps pour trouver des réponses. Pour les obtenir, la jeune femme va prendre un risque qui pourrait non seulement lui coûter la vie, mais détruire le genre humain.
La critique :
Réalisateur et scénariste canadien, Denis Villeneuve démarre sa carrière cinématographique via le court et le moyen-métrage avec REW FFWD (1994) et Cosmos (1996). En 1998, la sortie d'Un 32 Août sur Terre lui permet de connaître une gloire éphémère mais néanmoins remarquée. Le style avisé de Denis Villeneuve est immédiatement repéré par certains producteurs. Le cinéma lui confie donc logiquement plusieurs pellicules un peu plus onéreuses qui parviennent à flagorner un large public.
C'est par exemple le cas de Maelström (2000), Polytechnique (2009), Incendies (2010), Enemy (2013), Prisoners (2013), ou encore de Sicario (2015). Extatiques, les producteurs le chargent carrément de réaliser Blade Runner 2049, la suite tant attendue de Blade Runner (1982), le chef d'oeuvre science-fictionnel de Ridley Scott.
En l'occurrence, Denis Villeneuve n'est pas à son premier essai science-fictionnel. En effet, aujourd'hui, c'est le cas de Premier Contact, sorti en 2016, qui fait l'objet d'une chronique dans nos colonnes. A l'origine, le long-métrage est l'adaptation d'une nouvelle, L'histoire de ta vie, de Ted Chiang. La genèse de cette adaptation remonte à 2012 avec pour vocation de marcher dans le sillage et le continuum de Rencontres du Troisième Type (Steven Spielberg, 1977).
Le casting est rapidement confirmé et se compose d'Amy Adams, Jeremy Renner, Forest Whitaker, Mark O'Brien, Michael Stuhlbarg, Tiz Ma et Frank Schorpion. Non seulement, Premier Contact est unanimement plébiscité par les critiques et la presse cinéma, mais le film s'empare également de la troisième place du box-office américain.
Certains médias, encore plus extatiques, parlent même d'un film culte en devenir qui renouvelle le genre science-fictionnel. Reste à savoir si le long-métrage de Denis Villeneuve mérite un tel panégyrisme. Réponse dans les lignes à venir... Attention, SPOILERS ! Lorsque de mystérieux vaisseaux venus du fond de l’espace surgissent un peu partout sur Terre, une équipe d’experts est rassemblée sous la direction de la linguiste Louise Banks afin de tenter de comprendre leurs intentions.
Face à l’énigme que constituent leur présence et leurs messages mystérieux, les réactions dans le monde sont extrêmes et l’humanité se retrouve bientôt au bord d’une guerre absolue. Louise Banks et son équipe n’ont que très peu de temps pour trouver des réponses. Pour les obtenir, la jeune femme va prendre un risque qui pourrait non seulement lui coûter la vie, mais détruire le genre humain.
A l'aune de ce synopsis, rien ne semble distinguer Premier Contact de la concurrence de naguère. Evidemment, un tel script n'est pas sans rappeler celui de Rencontres du Troisième Type (déjà mentionné), ainsi que le 89e épisode de la série La Quatrième Dimension, à savoir Comment servir l'homme. A l'instar du film de Steven Spielberg et de The Twilight Zone, les protagonistes de Premier Contact s'interrogent eux aussi sur les réelles velléités d'extraterrestres aux intentions pour le moins nébuleuses. Impression renforcée par la complexion tentaculaire des aliens.
Contre attente, nos chers visiteurs ne ressemblent en rien aux extraterrestres de Roswell ni à des petits hommes verts. En l'état, le film se désintéresse assez vite du design polymorphique de ces envahisseurs pour cerner leur langage.
En outre, le langage est ici considéré comme la pierre angulaire de la civilisation. En l'occurrence, force est de constater que nous avons du mal à communiquer entre nous. Alors comment saisir l'essence d'un langage à base de signes dessinés dans les airs et qui échappent à toute compréhension humaine ? De facto, Premier Contact a une vraie consonance linguistique, conviant le spectateur à s’interroger non seulement sur le prisme et le champ de la pensée, mais aussi à sonder son propre passé, un peu à la manière du Docteur Louise Banks, dont la fille - que l'on imagine cancéreuse - vient d'exhaler son dernier soupir. C'est donc une scientifique encore endeuillée qui tente de cerner la complexité d'un langage métaphorique, qui s'inscrit à la fois dans le temps et dans une introspection douloureuse.
Ainsi, le langage extraterrestre se confronte à nos pulsions destructrices et primitives.
Par exemple, Chinois et Russes, pour le moins dubitatifs, déclarent la guerre à des extraterrestres à priori bellicistes... Or, la résolution de l'énigme se trouve ailleurs, quelque part dans les mystères de l'inconscience et de l'âme humaine. De surcroît, cette rencontre extraterrestre doit aspirer le genre humain à s'ouvrir sur lui-même et à conscientiser son immense potentiel. Par certaines accointances, Premier Contact n'est donc pas rappeler les dynamiques philosophiques et cosmologiques de 2001, l'Odyssée de l'Espace (Stanley Kubrick, 1968), un peu comme si l'univers et/ou une forme d'intelligence avancée devait revêtir les oripeaux d'un objecteur des consciences.
Certes, les esprits chagrins y verront un film de science-fiction au discours un peu trop angélique, à des années-lumière du remake de La Guerre des Mondes (Steven Spielberg, 2005), engoncé dans une vision noire et pessimiste de notre Humanité en déliquescence.
De surcroît, le film de Denis Villeneuve rompt littéralement avec la dialectique pérorée par la majorité des blockbusters actuels. Ainsi, Premier Contact se refuse à céder à toute tentation du spectaculaire au profit d'une approche intimiste et presque métaphysique, un peu à la manière d'un Solaris (Andreï Tarkovski, 1972), un autre film de SF auquel il emprunte certains aspects contemplatifs. En outre, Premier Contact se situe aux antipodes du remake de La Guerre des Mondes pour renâcler vers la science-fiction des années 1970. Avec Interstellar, le long-métrage de Denis Villeneuve renoue avec cette science-fiction de naguère, conviant le genre humain à examiner sa propre condition, notamment en termes de communication. Certes, Premier Contact n'est pas exempt de tout reproche.
A raison, les esprits chagrins tonneront et clabauderont après une conclusion finale un brin falote et complaisante. Mais on aurait tort de faire la fine bouche et de ne pas se délecter de ce blockbuster atypique, surtout dans un paysage cinématographique aussi délayé.
Note : 15/20