Genre : drame, horreur, ultra violence (interdit aux - 16 ans)
Année : 1984
Durée : 1h33
Synopsis : Un gang de voyous sème la terreur dans les rues de Los Angeles. Son leader, le cruel Jake, ne s'impose aucune limite dans le sadisme et la brutalité. Le gang entre souvent en conflit avec un groupe de filles décomplexées mené par la charismatique Brenda. Un soir, une dispute éclate entre les deux groupes et les filles détruisent la voiture des garçons. Pour se venger, ces derniers agressent Heather, la jeune soeur muette de Brenda. Laissée pour morte après avoir été violée, Heather sombre dans le coma. C'est alors que Brenda intervient, obsédée par la soif de vengeance et bien décidée à faire payer très cher leurs exactions à Jake et à ses sbires.
La critique :
En 1984, Linda Blair a bien grandi. De la gamine possédée aux torticolis à 360 degrés et aux déglutitions verdâtres, il ne reste plus qu'une charmante jeune femme aux formes avantageuses et au sourire carnassier. Autrement dit, L'exorciste c'est du passé, balayé, révolu. Le film d'horreur le plus terrifiant de tous les temps est devenu plus un boulet qu'un tremplin dans la carrière de l'actrice américaine. Il faut dire qu'entre 1973 et 1984, année de sortie de Savage Streets, elle en connu des déboires la Linda. L'enfant star mondialement acclamée s'est retrouvée prise dans un trafic de drogue qui a salement terni sa réputation. De plus, elle se fourvoya entre temps dans de nombreux navets dont le très mauvais L'Exorciste 2 : L'hérétique de John Boorman, dont le casting comprenant Louise Fletcher et Richard Burton, aurait dû pourtant laisser augurer un bon film.
En fait, Boorman se fourvoya dans une histoire de sorcier africain à la mords-moi le noeud qui fit péricliter son métrage auprès d'un public soudainement incrédule. Bref, en 1984 Linda Blair voyait son avenir cinématographique s'amenuiser tandis qu'inversement, son tour de poitrine augmentait dans des proportions conséquentes.
Mais trêve de propos sexistes, sinon je risquerais d'être 'hashtagué' "Balance ton porc" et de passer pour un intime d'Harvey Weinstein ! Parlons donc un peu de Les Rues De L'enfer aka Savage Streets en version originale. Cette série B ultra violente (mouais, il faut le dire vite) se fera remarquer à sa sortie par une classification X (surévaluée) mais qui a participé grandement à la notoriété du film aux États-Unis. Distribuée en France par Uncut Movies (ce qui est rarement un bon signe), cette oeuvre est un curieux mélange entre le film de gang, le campus movie et le rape and revenge. Un hybride assez curieux entre Class 84, I spit on your grave et même Fame (!).
Réalisé par l'illustre inconnu Danny Steinmann dont la "filmographie" se limite à trois métrages (dont un téléfilm), le film n'est pas totalement dénué de qualités mais alors, il faut vraiment bien les chercher ! En fait, Savage Streets ne vole pas très haut. Au-dessous de la ceinture, la plupart du temps. Danny Steinmann : ce réalisateur qui réussit cependant le prodige de profiter d'une retraite paisible en 2017, tout en étant déclaré décédé le 18 décembre 2012 !
Mais quel est donc l'incompétent qui a écrit sa fiche Wikipédia ? Au niveau des acteurs, inutile de chercher un quelconque nom connu au générique. Il y a Linda Blair et loin, mais alors très loin derrière, les autres. Et heureusement qu'elle est là Miss Blair car mis à part sa solide prestation, l'interprétation est unanimement douteuse pour ne pas dire médiocre. Stylistiquement, le film est estampillé années quatre-vingts à mort. Tous les poncifs y sont proposés de façon omniprésente : les brushings improbables, la musique rock électro, les jupes fluo, les jeunes qui conduisent des décapotables avec des canettes de bière à la main et la belle Linda qui porte des lunettes de soleil (même la nuit), en se baladant en tee-shirt ultra moulant, avec option tétons qui pointent (façon Jennifer Aniston dans Friends), rien ne nous est épargné ! Un vrai plaisir coupable pour les quadragénaires, un vrai supplice pour les plus jeunes !
Bon ok, c'est super ringard aujourd'hui mais il faut replacer Savage Streets dans le contexte de son époque. Et on pourrait lui pardonner aisément tous ses (très nombreux) défauts s'il y avait eu un soupçon de contenu à se mettre sous la dent par la suite.
Hélas, avec un scénario cousu de fil blanc, de la nudité gratuite et des dialogues d'une niaiserie affligeante, Savage Streets a vraiment beaucoup de mal à convaincre ; même le spectateur le moins exigeant. Le pire surgissant lors des doublages en français qui frisent une bêtise apocalyptique ; le visionnage en version originale est donc très vivement conseillé pour ne pas dire obligatoire. Certains passages font en effet furieusement penser au nanar légendaire Eaux Sauvages, référence absolue en matière de doublage catastrophique... Attention spoilers : Jake est le chef cruel d'une bande de voyous qui fait régner la terreur dans les rues de Los Angeles (en fait, on suppose que c'est Los Angeles puisque le nom de la ville n'est jamais cité). Racket, agressions, drogue, le gang règne en maître et terrorise les adolescents qui traînent dans leur secteur. Les malfrats, dragueurs invétérés et chercheurs de merde professionnels, ont souvent maille à partir avec une bande de nanas décérébrées et débridées du string, menées par leur charismatique cheftaine Brenda, la seule qui ait un caractère bien trempé.
Cette dernière a une soeur cadette muette et ingénue, Heather, que Brenda adore et protège autant qu'elle le peut. Le groupe de voyous provoque souvent les filles mais Brenda rend coup pour coup.
Pourtant un jour, le gang de Jake va se venger de la manière la plus ignoble en violant et en tabassant la pauvre Heather. Laissée pour morte, la jeune fille sombre dans le coma. Jake ne s'arrête pas là dans ses dérives meurtrières puisqu'il jette d'un pont Francine, la meilleure amie de Brenda, quelques jours avant son mariage et enceinte de surcroît. Désespérée, Brenda, convaincue de la culpabilité du gang, décide de retrouver les coupables et de se venger par n'importe quel moyen. Rape and revenge par procuration, Savage Streets n'est pas un film très sanglant mais déploie, enfin essaie de déployer, une très grande violence psychologique. Pourtant, la mayonnaise ne prend jamais tant la réalisation est d'une platitude sans nom et tant les incohérences sont nombreuses.
L'histoire est émaillée d'improbabilités et prêtent plus souvent à la perplexité et à la moquerie qu'à l'effroi. Pour un film réputé ultraviolent, ça la fout mal. Des exemples ? Tout d'abord, les soi-disant lycéens approchent facilement la trentaine et font vraiment leur âge à l'écran. Durant les cours, les élèves fument, dansent sur les tables et fricotent allègrement sans que les professeurs ne bougent une oreille.
Brenda (Linda Blair), convoquée par le proviseur, lui répond négligemment la clope au bec. À ces situations ubuesques, ajoutons que les dialogues sont d'une débilité abyssale et portés sur le sexe dans quasiment toutes les conversations. Les cours d'éducation sexuelle sont donc évidemment au programme et les réflexions salaces fusent de toutes parts. Ça commence à faire beaucoup... Mais Danny Steinmann n'en a cure et le réalisateur ne se prive d'ailleurs pas pour faire tomber son film dans un voyeurisme clairement assumé lors d'une scène de douche où les filles sont filmées langoureusement et sous toutes les coutures. Il apparaît évident que le réalisateur veut choquer son auditoire.
Et la violence dans tout ça? Nous arrivons 70 minutes de projection et il ne s'est pas passé grand-chose. En fait, Savage Streets souffre d'un éparpillement d'idées saugrenues qui le fait basculer d'un genre à l'autre en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Steinmann semble naviguer à vue et constamment hésiter sur la direction qu'il veut donner à son histoire. Pourquoi nous bassiner avec des disputes de gamines post-pubères (interprétées par des actrices de 30 ans) se disputant les faveurs d'un "ado" (même pas boutonneux puisque trentenaire lui aussi) doté d'un QI de bigorneau? Mystère.
Certes, par un jeu nettement plus professionnel que celui de ses partenaires, Linda Blair fait bien ce qu'elle peut pour sauver le film du naufrage, mais à l'impossible nul n'est tenu. En réalité, il n'y a pas grand-chose à sauver de cette série B dont on a du mal à comprendre la flatteuse réputation d'oeuvre ultra violente. Si le final relève très légèrement le niveau en nous offrant le duel promis entre entre Branda la justicière, et Jake le pervers, nous sommes loin d'atteindre les sommets de débauches graphiques annoncées. En cela, le film est loin d'arriver à la cheville d'un Class 84, nettement plus puissant dans le ressenti de l'angoisse à l'écran et du crescendo dans la violence finale.
Danny Steinmann manquait de talent pour faire carrière, c'est évident. Certainement conscient de ses carences artistiques, le réalisateur préféra arrêter les frais pour le bien de tous et surtout pour celui des spectateurs. Quant à Linda Blair, sa carrière à elle, continua à s'enliser dans de médiocres productions tombées unanimement dans l'oubli. Cela laisse quand même l'impression d'un beau gâchis car cette fille avait le potentiel pour se tracer un parcours cinématographique autrement plus intéressant que cette filmographie atypique où n'émergera à tout jamais qu'un seul film (mais quel film !). Dommage... On pourrait d'ailleurs curieusement, comparer les destins de l'actrice et de ce Savage Streets où elle trouva son dernier rôle notable : toutes les cartes en main pour réussir mais au final, un échec sur toute la ligne. Étant dans ma période de générosité, j'éviterai de noter le film parmi les navets, mais il frôle tout de même de très près cette honteuse qualification. Alors, qu'est-ce qu'on dit ? Merci Linda !
Note : 08/20