mort ou vif

Genre : western
Année : 1995
Durée : 1h48

Synopsis : Herold, qui règne en maître sur la petite ville de Redemption, organise chaque année un tournoi de duels dont le vainqueur empoche 123 000 dollars. Jusqu'à présent il a toujours gagné. Cette fois-ci, Ellen, une ravissante jeune étrangère participe à la compétition. Qui pourrait, vingt ans après, reconnaître en elle la petite fille en larmes dont le père, shérif à Redemption, avait été torturé à mort par Herold... 

La critique :

Certes, le nom de Sam Raimi est invariablement affilié à la saga Evil Dead, ainsi qu'à la trilogie Spider-Man. Certes, Sam Raimi a essentiellement oeuvré et besogné pour le cinéma fantastique et d'épouvante. Les thuriféraires du cinéaste américain citeront aisément Mort sur le grill (1985), Darkman (1990), Jusqu'en Enfer (2009), ou encore Le monde fantastique d'Oz (2013). Mais corrélativement, Sam Raimi n'a jamais caché son extatisme pour le western et en particulier pour la trilogie du Dollar (Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus et Le Bon, la brute et le truand) amorcée par Sergio Leone. Il n'est donc pas très étonnant de retrouver le réalisateur derrière la caméra de Mort ou Vif, sorti en 1995. C'est Sharon Stone, par ailleurs vedette du film, qui fait appel aux soins, à l'érudition et à la dextérité du metteur en scène.

A l'époque, la comédienne est encore couronnée, adulée et adoubée par le succès de Basic Instinct (Paul Verhoeven, 1992). Désignée coproductrice de Mort ou Vif, Sharon Stone dispose d'une liste exhaustive et foisonnante de réalisateurs affûtés. Son choix se porte immédiatement pour Sam Raimi. Sharon Stone n'a jamais tari d'éloges sur la trilogie Evil Dead et souhaite donc collaborer avec le cinéaste. De son propre aveu, ce dernier ne s'attendait pas à un tel dithyrambe : "Je n’y croyais pas. J’avais envie de la rappeler et de lui demander si elle était sûre d’avoir appelé la bonne personne. Mais je ne l’ai pas fait" (source : http://www.allocine.fr/film/fichefilm-12695/secrets-tournage/).
Sharon Stone choisit alors de diligenter les opérations ainsi que le casting du film. L'actrice impose carrément la présence de Leonardo DiCaprio, encore méconnu à l'époque.

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Or, l'acteur s'est déjà illustré dans Gilbert Grape (Lasse Halström, 1994) et ses adulateurs lui promettent déjà une carrière fulgurante. Une prescience qui sera corroborée quelques années plus tard avec la sortie de Titanic (James Cameron, 1997). Viennent également s'agréger d'autres comédiens prestigieux, notamment Gene Hackman, Russell Crowe, Tobin Bell, Lance Henriksen, Keith David, Roberts Blossom, Kevin Conway, Pat Hingle et Gary Sinise. Pour l'anecdote, l'acteur Bruce Campbell tournera même quelques saynètes pour les besoins du film, mais ses apparitions élusives ne seront finalement pas retenues pour le montage final. A contrario, le nom du comédien apparaît lors du générique du film, Bruce Campbell ayant participé à la production de Mort ou Vif.
Que l'interprète se rassure. Son absence n'entachera pas sa carrière cinématographique puisque le long-métrage se soldera par un bide commercial.

Un camouflet qui affectera longtemps et durablement un Sam Raimi dépité. A sa décharge, le western reste un registre cinématographique ostracisé par le public et les producteurs depuis plusieurs décennies. Seul le bien nommé Impitoyable (Clint Eastwood, 1992) fait figure d'exception notable. Les maigres recettes de Mort ou Vif ne permettront même pas de rembourser le budget imparti. Une sérieuse déconvenue, même pour Sharon Stone qui verra sa carrière peu à peu se déliter au fil des années. Même les critiques et la presse spécialisée se montrent plutôt pondérées, qualifiant ce western de petite série B sans envergure. Reste à savoir si Mort ou Vif mérite une telle rebuffade.
Réponse dans les lignes à venir... Attention, SPOILERS ! Herold, qui règne en maître sur la petite ville de Redemption, organise chaque année un tournoi de duels dont le vainqueur empoche 123 000 dollars. 

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Jusqu'à présent il a toujours gagné. Cette fois-ci, Ellen, une ravissante jeune étrangère participe à la compétition. Qui pourrait, vingt ans après, reconnaître en elle la petite fille en larmes dont le père, shérif à Redemption, avait été torturé à mort par Herold... Comme une évidence. En 1995, la sortie de Mort ou Vif doit exhumer de ses cendres et de sa sépulcre le western spaghetti. Le film de Sam Raimi se doit de ressusciter ces vieilles figures de jadis, celles qui se rudoient, se collettent, se démanchent et s'admonestent dans un Far West tuméfié et souvent régenté par une bande de renégats. Seule différence et pas des moindres, la figure vengeresse de Mort ou Vif n'est plus cette ombre masculine criant haro sur ses agresseurs, mais une femme éprise elle aussi de représailles.
En rétorsion, la jolie blondinette s'acoquine et s'énamoure de Cort (Russell Crowe), un ex-voyou repenti et as de la gâchette.

Symboliquement, ce personnage subalterne préfigure ce justicier anonyme ressorti de ses pénates. Affables, Sharon Stone et Sam Raimi proposent toute une galerie de personnages charismatiques. Egal à lui-même, Gene Hackman réitère le bon vieux numéro de cet homme spécieux et fallacieux qui exploite la plèbe et la populace. Hélas, l'acteur n'a pas compris qu'il n'était plus dirigé par la caméra avisée de Clint Eastwood dans Impitoyable. Indubitablement, Mort ou Vif n'a pas de telles aspérités et se noie prestement dans un scénario prosaïque. Après une petite demi-heure de bobine, le spectateur aguerri aura aisément subodoré les tenants et les aboutissants d'un script ô combien prévisible.
Pas besoin de revêtir les oripeaux d'un fin limier ou d'un vaticinateur pour deviner la suite des inimitiés. 
Mort ou Vif ne possède évidemment pas la finesse ni la sagacité d'un Impitoyable ou de n'importe quel chapitre de la trilogie du Dollar. 

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Le film de Sam Raimi souffre invariablement de la comparaison avec ses augustes devanciers. Rien, pas même son casting pléthorique, ne lui permettra de rectifier le tir. D'ailleurs, ce n'est pas un hasard, le scénario de cette pellicule ne repose que sur une succession de défis menant directement vers la tombe. Pour Sam Raimi, le tombeau prendra la forme d'un immense gouffre financier. Bien sûr, les allusions furtives aux westerns d'antan sont éloquentes et ne manqueront pas d'effaroucher le cinéphile averti. Malencontreusement, toutes ces allégories sont au mieux chimériques, Sam Raimi étirant allègrement son western sur la longueur.
Même aidé par ses flashbacks et la présence de Billy the Kid en personne, le long-métrage ne parvient jamais - ou presque... - à transcender son récit. Certes, Sam Raimi est nanti des meilleures intentions du monde. Magnanime, le cinéaste nous gratifie d'un western crépusculaire qui souffre néanmoins d'un scénario anomique. Sur la forme comme sur le fond, Mort ou Vif apparaît bel et bien comme une série B lucrative à peine sauvée par sa distribution plantureuse.
A la rigueur, seuls les néophytes apprécieront cette aventure menée tambour battant. Les autres fustigeront et vitupéreront, à raison, ce long-métrage qui marche directement dans le sillage des westerns de Sergio Corbucci.

Note : 10.5/20

sparklehorse2 Alice In Oliver