Genre : horreur (interdit aux - 12 ans)
Année : 2018
Durée : 1h35
Synopsis : Des années après que l'Europe ait été ravagée par le virus Maze qui transforme les humains en monstres cannibales, un antidote est enfin trouvé. Sean Brown est hanté par ce qu'il a fait. Alors qu'il revient vivre chez sa belle-sœur devenue veuve, la peur et la suspicion risquent de plonger de nouveau le monde dans le chaos.
La critique :
Certes, c'est vraiment à partir de 1969 que le genre "zombies décrépits" va officialiser et corroborer son acte de naissance via La Nuit des Morts-Vivants (George A. Romero). Mais bien avant le chef d'oeuvre morbide et putride de Romero, d'autres productions horrifiques avaient déjà mis en exergue des cadavres putrescents revenir subrepticement à la vie. Les thuriféraires les plus éminents citeront notamment Le Mystère du Château Maudit (George Marshall, 1940), Le Mort Qui Marche (Michael Curtiz, 1936), Le Cadavre Qui Tue (Sidney J. Furie, 1961), Vaudou (Jacques Tourneur, 1943) et surtout Carnival of Souls (Herk Harvey, 1962). Indubitablement, George Romero va marquer, de son empreinte indélébile, ce registre méphitique et aux relents eschatologiques.
Via l'arrivée du metteur en scène émérite, les morts-vivants se parent de consonances sociologiques, politiques et idéologiques.
A travers sa trilogie des morts, George Romero vilipende, semonce et abhorre une société américaine atone et engoncée à la fois par ses tares sociétales, ses carences xénophobes, son hédonisme et sa scopophilie maladive, soit les principales lacunes de notre monde agencé par le capitalisme, les réseaux sociaux et plus récemment encore, par une uberisation irréfragable. Toutefois, à partir des années 1980, l'horreur sociologique, adoubée par Romero en son temps, sera suppléée par une épouvante beaucoup plus pittoresque et funambulesque.
Ainsi, Le Jour des Morts-Vivants (George A. Romero, 1985) est curieusement évincé par des pellicules gore et truculentes, entre autres Le Retour des Morts-Vivants (Dan O'Bannon, 1985) et Le Retour des Morts-Vivants 3 (Brian Yuzna, 1993).
Certains réalisateurs bisseux profiteront de ce phénomène pour transmuter le phénomène "zombiesque" en une parodie ubuesque et sanguinolente. Entre les années 2000 et 2010, les morts-vivants anthropophages retrouveront quelques relents de vélocité à travers le diptyque 28 Jours Plus Tard (Danny Boyle,2002) / 28 Semaines Plus Tard (Juan Carlos Fresnadillo, 2007), puis surtout via la série télévisée The Walking Dead. Désormais, on ne compte même plus toutes ces productions fastidieuses et exsangues qui sortent directement en DTV (direct-to-video) et qui se réclament du cinéma de Romero, de Brian Yuzna ou encore de Joe d'Amato, des réalisateurs proéminents.
Reste à savoir dans quelle catégorie va s'imbriquer The Cured, réalisé par les soins de David Freyne en 2018. The Cured signe également le tout premier long-métrage du cinéaste impétueux.
Auparavant, David Freyne a surtout officié derrière quelques courts-métrages, notamment The First Wave (2014), The Tree (2013) et The Mill (2009), par ailleurs inconnus au bataillon et inédits dans nos contrées hexagonales. The Cured n'a évidemment pas bénéficié d'une sortie dans les salles obscures et a dû se contenter d'une sortie élusive dans les bacs à dvd. The Cured s'est donc arrogé, bon gré mal gré, le statut de film indépendant produit par Ellen Page, une actrice qui milite ponctuellement pour certaines petites productions américaines.
De facto, The Cured apparaît aussi comme une série B désargentée mais nantie de grandes ambitions, celles notamment de contrarier l'hégémonie de Zombie (George A. Romero, 1978) et de ses nombreux succédanés.
Inutile alors de préciser qu'une telle gageure est pour le moins périlleuse, voire hasardeuse. Affable, Ellen Page s'arroge également le rôle principal - celui d'Abbie - dans The Cured. Viennent également s'agréger Sam Kelley, Tom Vaughan-Lawlor, Stuart Graham, Paula Malcolmson, Natalia Kostrzewa, Hilda Fay et Sarah Kinlen. Attention, SPOILERS ! (1) Des années après que l'Europe ait été ravagée par un virus mortel, nommé Maze, qui transforma les humains en morts-vivants, un vaccin est enfin trouvé. L'antidote est un succès sur eux : les cannibales redeviennent des êtres humains normaux mais les effets secondaires sont intenses car ils se souviennent parfaitement de tous les actes qu'ils ont commis lorsqu'ils étaient infectés. La réintégration des anciens zombies dans la société est mal perçue par les autres humains survivants qui, inquiets de leur retour parmi eux, décident de les isoler dans un ghetto.
Une jeune veuve, Abbie, recueille chez elle son ancien beau-frère, Senan. Ce dernier, guéri de ses envies cannibales, est traumatisé par ses actes sauvages.
Mais la situation dégénère lorsqu'un mouvement terroriste émerge de ces anciens morts-vivants et que le gouvernement décide de les éliminer une fois pour toutes (1). A l'aune de cette exégèse, le spectateur avisé aura aisément subodoré les intentions de David Freyne via The Cured. Indiscutablement, le long-métrage horrifique renoue avec les rhétoriques politiques et sociétales de La Nuit des Morts-Vivants et de Zombie en leur temps. David Freyne connaît ses classiques sur le bout des lèvres et réitère avec cette épouvante de naguère. Ainsi, The Cured s'apparente à une métaphore sur les discordes et les fragmentations qui ont touché l'Irlande depuis plusieurs décennies.
Les belligérances concernent trois classes bien distinctes : les zombies qui ont ravagé et dévoré une bonne partie des Européens, les morts-vivants sauvés in extremis d'une contamination exponentielle et ceux qui sont restés humains.
Toute la sagacité de The Cured se résume dans ce concept empreint de roublardise. Pour une fois, point d'Apocalypse, ni de survivants qui s'escarpent à travers les décombres de la ville. L'Humanité a survécu au virus Maze et a même trouvé la véritable panacée à cette inoculation massive. Seul bémol et pas des moindres, tout le monde n'est pas réceptif au remède thaumaturgique. De facto, les survivants sont parqués dans la pénombre et régulièrement rabroués par le gouvernement irlandais. David Freyne élude de s'escarper vers une dystopie militaire.
Dommage car c'est pourtant ce didactisme, hélas inévitable, qui point le bout de son nez, surtout à l'aune d'une Europe tuméfiée, enkystée et gangrenée par les réminiscences du fascisme et de l'extrême droite. On se demande pourquoi David Freyne se montre aussi lapidaire et esquive autant ce sujet tant la parabole paraît éloquente, voire inhérente...
En outre, le manque de budget se fait furieusement sentir. Pour le spectateur hébété, il faudra faire preuve de longanimité et patienter un long moment (presque une heure de film tout de même...) avant d'assister à plusieurs saynètes de frénésie généralisée. Avant cela, David Freyne prendra le temps de se polariser sur quelques protagonistes en déveine. Corrélativement, Ellen Page, également affublé du statut de productrice, se hâte, palabre et se démène. Difficile de ne pas percevoir l'investissement sourcilleux de l'actrice émérite... Hélas, une chimère. En résulte un drame "zombiesque" curieusement apathique, mais qui retrouve quelques velléités dans sa dernière demi-heure.
The Cured se situe donc au-dessus de la moyenne des DTV anomiques et habituels. Cependant, cette production mineure ne risque pas d'éreinter ni d'effaroucher une concurrence apoplectique en la matière. Encore une fois, dommage, car le film possède pourtant de solides arguties dans sa besace.
Note : 12.5/20
Alice In Oliver
(1) Synopsis du film : https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Cured
J’ai aimé l’angle de ce film, ça change d’un shema habituel et le côté meute était intéressant mais difficile de comprendre la fin quel est votre avis ?