Les_experiences_erotiques_de_Frankenstein

Genre : horreur, épouvante, érotique, inclassable, expérimental (interdit aux - 16 ans)
Année : 1973
Durée : 1h14

Synopsis : Le terrible sorcier Cagliostro souhaite à tout prix mettre la main sur le monstre fabriqué par le docteur Frankenstein. Son sombre dessein est de l'accoupler avec la créature qu'il a créée pour donner naissance à une soi-disant "race parfaite". Pour éviter le désastre et affronter le sorcier et ses sbires, il ne reste plus que la fille du docteur et un médecin dévoué.  

 

La critique :

Certes, Cinéma Choc se polarise prioritairement sur les films trash, gore, horrifiques, déviants et expérimentaux, mais pas seulement. Depuis ses tous premiers ânnonements sur la Toile, le blog n'a jamais caché son effervescence, ni son appétence pour le cinéma bis, qu'il soit de l'obédience du fantastique, de l'horreur et de la science-fiction. Par ailleurs, ponctuellement, le cinéma underground et le cinéma bis se confédèrent pour arborer de purs produits d'exploitation. Ainsi, au cours de ses pérégrinations, Cinéma Choc a déjà abordé plusieurs cinéastes éminents de la série B.
Ces derniers se nomment, entre autres, Brian Yuzna (Le retour des morts-vivants 3 et Le Dentiste), Stuart Gordon (Re-Animator, Aux Portes de l'au-delà et Castle Freak), Joe D'Amato (Blue Holocaust, Anthropophagus et Horrible), Mario Bava (La planète des vampires et La Baie Sanglante), Jack Arnold (L'homme qui rétrécit et Tarantula !), ou encore Roger Corman (L'attaque des crabes géants et Teenage Cave Man).

Même John Carpenter, après l'échec cinglant de The Thing (1982) dans les salles obscures, lutinera et s'acoquinera avec le cinéma bis via Prince des Ténèbres (1987) et Invasion Los Angeles (1988). Tous ces augustes réalisateurs ont connu les ferveurs de Cinéma Choc en leur temps, tous sauf Jesùs Franco. Certes, le blog a déjà mentionné son cryptonyme sérénissime à maintes reprises via son influence majeure sur certains réalisateurs subalternes. Comment ne pas songer, par exemple, à Andreas Bethmann, qui s'est autoproclamé comme le parangon démiurgique du "porno gore" ?
Mais pour le moment, le blog ne s'était pas encore attelé à la chronique d'un film de Jesùs Franco. Il était donc temps de rectifier cette omission. Pour souvenance, le metteur en scène ibérique a sévi "sous de nombreux pseudonymes dont Clifford Brown, Adolf M. Frank, J.P. Johnson, David Khune et Jess Frank" (Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jes%C3%BAs_Franco).

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Tout d'abord voué à une carrière de compositeur émérite et au service du noble Septième Art, Jesùs Franco se lance, corrélativement, dans la réalisation de courts-métrages de commande. Puis, avec les années, l'artiste fait de l'horreur et de l'érotisme ses principaux leitmotivs. C'est au cours de ses pérégrinations cinéphiliques qu'il s'éprend de l'actrice Lina Romay. Cette dernière devient sa nouvelle égérie. Jesùs Franco est notamment réputé pour une filmographie fructueuse, exhaustive, foisonnante et éclectique, couronnée de 185 films, rien que ça !
Les thuriféraires du cinéaste n'omettront pas de stipuler des oeuvres telles que L'horrible docteur Orloff (1962), Le diabolique docteur Z (1966), Les nuits de Dracula (1970), Les Démons (1972), La Comtesse Perverse (1972), Une fille pour les cannibales (1980), ou encore L'abîme des morts-vivants (1982) parmi les longs-métrages notables et éventuellement notoires.

Vient également s'additionner Les Expériences Erotiques de Frankenstein, sorti en 1973. Pour la faribole superfétatoire, cette "bisserie" désargentée est également connue sous les cryptonymes de La Malédiction de Frankenstein et The Rites of Frankenstein. A noter que le film a connu les ferveurs du site Nanarland (Source : http://www.nanarland.com/Chroniques/chronique-experienceserotiquesdefrankenstein-les-experiences-erotiques-de-frankenstein.html), via une chronique aussi truculente que sarcastique ; ce qui laisse inaugurer un petit nanar sans grande envergure.
Reste à savoir si le métrage mérite de tels opprobres et de telles acrimonies. Réponse à venir dans les lignes de cette chronique... Par le passé, le mythe de Frankenstein a toujours passionné le cinéma gore et horrifique, quitte parfois à verser dans les lubricités subsidiaires.

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Rien que l'intitulé du film, à savoir Les Expériences Erotiques de Frankenstein (au cas où vous n'auriez pas suivi), a le mérite d'attiser notre curiosité obscène... Epouvante et lascivité se retrouvent, bon gré mal gré, coalisées pour satisfaire les pulsions satyriasiques, ainsi que l'imagination fertile du spectateur hébété. Par ailleurs, Les Expériences Erotiques de Frankenstein a écopé d'une interdiction aux moins de 16 ans. Toutefois, que le public pudibond et timoré se rassérène. Le film n'est pas ce festival de gore ni de tripailles rougeoyantes que son intitulé - ubuesque - laisse présager.
La distribution de cette série B se compose d'Alberto Dalbés, Dennis Price, Howard Vernon, Beatriz Savon, Fernando Bilbao, Britt Nichols, Luis Barboo, Daniel White, Lina Romay et Jesùs Franco lui-même (donc, à la fois devant et derrière la caméra).

Attention, SPOILERS ! (1) Dans son laboratoire, le docteur Frankenstein, aidé de son assistant Morpho, achève l’œuvre de sa vie : la transplantation d'un nouveau cerveau dans sa créature, un géant à la force colossale, afin de la rendre intelligente et lui insuffler la parole. Mais elle est aussitôt kidnappée par Melissa, une femme-oiseau, et son serviteur dévoué Caronte. Dans la lutte, le docteur a été gravement blessé et Morpho a été tué. Melissa et Caronte ramènent le monstre au château de Cagliostro, un puissant sorcier qui a engendré la première, une oracle vampire et clairvoyante, à partir d'un œuf et de la semence. Cagliostro envisage d'utiliser la créature de Frankenstein afin qu'elle lui ramène de jeunes vierges pour satisfaire ses envies sexuelles.
Mais il compte surtout le faire accoupler avec un autre monstre qu'il a lui-même crée, une femme parfaite constituée de morceaux de filles pures mortes pour qu'elle accouche ensuite d'un être suprême et supérieur. Ce dernier sera la clé de voûte de Panthos, une secte de morts-vivants que contrôle le sorcier nécromancien (1).

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Vous l'avez donc compris. La trame narrative de Les Expériences érotiques de Frankenstein brille avant tout par son amphigourisme. Le scénario n'est pas vraiment l'acmé, ni l'apanage de cette production insolite. Pis, le métrage de Jesùs Franco n'a même pas pour vocation d'explorer, ni de réactiver ce fameux complexe d'Icare, une thématique spinescente et qui prévaut pour ce médecin-chirurgien transi par le divin, l'ineffable, le morbide et la cupidité. Ce médicastre spécieux et fallacieux cherche mordicus à exhumer la mort de ses sépulcres via la confection éparse d'une ribambelle de cadavres.
Jesùs Franco n'a pas vraiment pour aspérité de sonder ni d'analyser cette facette méphitique du célèbre chirurgien. En vérité, Les Expériences Erotiques de Frankenstein s'apparente davantage à une sorte d'affabulation cinématographique, justement prodiguée par la diligence de Jesùs Franco.

Apparemment, le cinéaste, très en forme pour l'occasion, louvoie entre les morts-vivants putrescents, le fétichisme, la mutation génétique qui dérive vers la création d'une femme-oiseau, le sadomasochisme et la production joyeusement alambiquée. De facto, Les Expériences Erotiques de Frankenstein s'apparente à une série B disparate qui tergiverse continûment entre l'épouvante, l'érotisme, l'ésotérisme et l'expérimental. En ce sens, le long-métrage de Jesùs Franco constitue à lui seul une expérience singulière et à part entière qui flagornera, sans doute, les thuriféraires de pellicules transgressives et dénotatives. Jesùs Franco nous affuble de jolies gourgandines, allègrement dévêtues et dépoitraillées pour l'occasion. A contrario, cette bisserie n'est pas exempte de tout grief, loin de là !
Exempt le scénario dont le film s'exonère sciemment, Les Expériences Erotiques de Frankenstein est une production joliment désuète qui frise l'amateurisme à tous crins par ses effets spéciaux ringards et ses maquillages encore plus obsolescents. 
Côté casting, là aussi c'est le dilettantisme qui règne arrogamment, laissant songer à une production aussi fantasque que nébuleuse, et qui finit par dérouter après 45 minutes de bobine. On comprend mieux les persifflages circonstanciels du site Nanarland, ainsi que cette circonspection ostentatoire.
En outre, l'auteur de ces lignes se juxtapose lui aussi sur ce même scepticisme, tant ces expériences érotiques s'assimilent à une sorte de salmigondis orgiaque sur pellicule. A fortiori, Jesùs Franco semble bien être le seul à comprendre la sémiotique et la sémiologie de ses propres fantasmagories. Ma note finale fera donc preuve de miséricorde et de mansuétude car le film mérite sans doute moins, beaucoup moins...

 

Note : 08/20

sparklehorse2 Alice In Oliver 

(1) Synopsis du film : https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Exp%C3%A9riences_%C3%A9rotiques_de_Frankenstein