Genre : horreur, épouvante (interdit aux - 12 ans)
Année : 2018
Durée : 1h37
Synopsis : Quand on apprend le suicide d'une jeune nonne dans une abbaye roumaine, la stupéfaction est totale dans l'Église catholique. Le Vatican missionne aussitôt un prêtre au passé trouble et une novice pour mener l'enquête. Risquant leur vie, les deux ecclésiastiques doivent affronter une force maléfique qui bouscule leur foi et menace de détruire leur âme. Bientôt, l'abbaye est en proie à une lutte sans merci entre les vivants et les damnés…
La critique :
Vous l'avez sans doute remarqué, tout du moins subodoré. Depuis quelques temps, Cinéma Choc se centre et se polarise sur l'univers Conjuring, soit "The Conjuring verse" dans la langue de Shakespeare. Derrière cet univers macabre et nimbé par des forces méphistophéliques, se tapit un certain James Wan. Pour souvenance, la notoriété de ce réalisateur, scénariste et producteur s'est édifiée vers le milieu des années 2000 avec Saw (2004), un long-métrage horrifique qui relance l'engouement pour l'âpreté et le torture porn. A l'origine, rien ne prédestinait cette production impécunieuse à devenir la nouvelle égérie du cinéma gore. Avec Saw, James Wan réactive la mode du serial killer sagace et sociopathique. Son nom ? Jigsaw. Le tueur au puzzle séquestre des victimes et s'ébaudit de leur vie expiatoire et en déperdition. Pour s'en sortir, ces dernières doivent mériter de vivre et prouver leur vaillance face à une mort certaine.
Le piège mortel est donc conçu, pensé et ratiociné comme une épreuve salvatrice ou morbide. Saw défie tous les pronostics et caracole en tête de peloton lors de son exploitation dans les salles obscures. A raison, les producteurs exultent et exhortent James Wan à poursuivre les belligérances guerroyeuses via de nouvelles suites putatives et consécutives. Mais le metteur en scène mutin n'a cure des instigations de ses financeurs. James Wan délaisse la franchise à d'autres tâcherons en disgrâce. Ces derniers se chargeront de soudoyer la saga vers des abîmes de modicité et de fastidiosité.
Que soit. James Wan prise et affectionne davantage l'épouvante à l'ancienne, celle de La Maison du Diable (Robert Wise, 1963), d'Amityville - La Maison du Diable (Stuart Rosenberg, 1979), ou encore de Poltergeist (Tobe Hooper, 1982).
Aux yeux de James Wan, ces classiques du cinéma d'horreur font figure de véritables bréviaires. Madré, le cinéaste décide d'exhumer ce registre de naguère. Tout commence avec Dead Silence (2007), une série B horrifique qui passe hélas inaperçue en salles. James Wan s'échine dans cette résurgence de forces inexpugnables et lucifériennes. Ainsi, Insidious (2011), Insidious - Chapitre 2 (2013), Conjuring - Les Dossiers Warren (2013) et Conjuring - Le Cas Endfield (2016) corroborent l'omnipotence du réalisateur sur le cinéma d'épouvante.
Via le diptyque consacré à Conjuring, James Wan retranscrit les travaux, les investigations et les véritables pérégrinations des époux Warren. Il n'en faut pas davantage pour inciter les producteurs à financer des séquelles, des spin-off et des préquelles intrinsèques à cet univers.
En concomitance, Annabelle (John R. Leonetti, 2014), Annabelle 2 - La Création du Mal (David F. Sandberg, 2017) et Annabelle - La Maison du Mal (Michael Chaves, 2019) forment une triade infernale sur une poupée machiavélique et démoniaque. Viennent également s'agréger La Malédiction de la Dame Blanche (Gary Dauberman, 2019) et La Nonne (Corin Hardy, 2018). Aujourd'hui, c'est le cas de La Nonne, à ne pas confondre avec le film ibérique et éponyme de 2005, qui fait l'objet d'une chronique dans nos colonnes éparses.
Dans l'univers cinématographique, Corin Hardy fait presque office de noviciat. La Nonne constitue "seulement" (si j'ose dire...) sa seconde réalisation, juste après Le Sanctuaire (2015). James Wan s'affaire donc au scénario du film.
Dixit les propres aveux du cacographe, ce premier chapitre pourrait connaître une suite consubstantielle, à condition que les recettes soient suffisamment éloquentes lors de son exploitation dans les salles de cinéma. Nonobstant des saillies rédhibitoires, La Nonne se solde par un succès pharaonique, surtout sur le territoire américain. Depuis la sortie de Conjuring - Les Dossiers Warren, le public extatique répond toujours doctement à l'appel en dépit d'une qualité en intermittence. Au moins, La Nonne peut s'enorgueillir d'une oriflamme aux teintes noirâtres et comminatoires, affichant le faciès pandémoniaque d'une nonne obséquieuse et trépassée depuis des temps immémoriaux.
La distribution du film se compose de Taissa Farmiga, Demiàn Bichir, Bonnie Aarons, Ingrid Bisu, Jonas Bloquet, Charlotte Hope, Sandra Teles, Jared Morgan et David Horvovitch.
On assiste également aux caméos de Patrick Wilson et Vera Farmiga, le scénario de La Nonne étant en immanence avec les événements de Conjuring. Attention, SPOILERS ! (1) L’histoire de La Nonne se déroule au début des années 50 (1952, pour être précis), dans une abbaye au cœur d’une forêt roumaine. Pour donner suite au suicide d’une jeune sœur au cœur du lieu, le Vatican décide d’envoyer un prêtre au passé trouble et une jeune novice pour enquêter sur ces événements étranges. Après avoir fait la connaissance d’un jeune homme qui les mène jusqu’au couvent, les deux ecclésiastiques se rendent compte qu’une force maléfique domine l’endroit et qu’ils devront risquer leurs vies pour éviter que cette dernière ne prenne possession des lieux et fasse le mal sur Terre (1).
Bientôt, l'abbaye est en proie à une lutte sans merci entre les vivants et les damnés…
Indubitablement, La Nonne baguenaude dans le même sillage et continuum que la trilogie Annabelle. A défaut de jouer l'originalité, ce nouveau film d'épouvante se contente d'exploiter sciemment l'univers consacré à Conjuring. James Wan a parfaitement discerné l'ampleur du phénomène. C'est probablement la raison pour laquelle il délaisse cet univers à d'abominables histrions. Dans cet exercice, Corin Hardy assure le minimum syndical. Le film est correctement réalisé et interprété. Au moins, le film se pare de décors somptuaires, mais ne parvient jamais à transcender son abbaye pourtant nimbée par les ténèbres. Un comble pour cette nouvelle segmentation issue de l'univers Conjuring !
Certes, on retrouve les arguties inhérentes et habituelles : ambiance lugubre, un mystère qui émane d'une étrange abbaye et une force spécieuse et acrimonieuse qui sévit quelque part dans les coursives du monastère.
La seule bonne idée du film repose sur le duo coalisé par cette soeur novice et ce prêtre seriné par les réminiscences douloureuses du passé. Hélas, cette coalescence n'est jamais exploitée et rappelle, entre autres, un autre duo (le Père Merrin et le Père Karras) en apothéose dans L'Exorciste (William Friedkin, 1974). Hélas, la métaphore s'arrête bien là. Via La Nonne, Corin Hardy n'a pas de telles velléités. Au détour de ses une heure et trente-sept minutes de bobine interminables, on se surprend à ne jamais tressaillir. Ou alors, peu ou prou. Pour le spectateur éberlué, il faudra faire preuve de longanimité et patienter jusqu'à l'épilogue final, et donc jusqu'à cet affrontement avec la soeur fantomatique et acariâtre, pour espérer une once de stupeur ; mais guère davantage.
Dans cette production frelatée et aseptisée, seule la jolie Taissa Farmiga surnage. Elle est bien la seule comédienne à se départir dans cette pellicule exsangue et famélique. Pourtant, à l'instar de la trilogie Annabelle, La Nonne peut se targuer de posséder un démon d'une redoutable perniciosité. Malencontreusement, le long-métrage est victime de nombreuses chutes de rythme, ainsi que d'interminables palabres. Devant le résultat erratique de cette nouvelle forfaiture sur pellicule, on saurait gré de quémander les producteurs à cesser définitivement les animosités. Non pas que La Nonne soit le "naveton" avarié et décrié, mais ce long-métrage d'épouvante s'avoisine derechef à une séquelle d'une vacuité pélagienne.
Note : 08/20
Alice In Oliver
(1) Synopsis du film sur : https://www.journaldugeek.com/critique/critique-nonne-spin-off-naurait-voir-jour/