Genre : fantastique, aventure
Année : 2017
Durée : 1h59
Synopsis : Un groupe d'explorateurs plus différents les uns que les autres s'aventurent au cœur d'une île inconnue du Pacifique, aussi belle que dangereuse. Ils ne savent pas encore qu'ils viennent de pénétrer sur le territoire de Kong…
La critique :
On omet de le dire et de le préciser, mais la toute première version de King Kong (Ernest B. Schoedack et Merian C. Cooper, 1933) n'est, in fine, qu'un palimpseste de Le Monde Perdu (Harry O. Hoyt, 1925). Pour la première fois au cinéma, le long-métrage fantastique d'Harry O. Hoyt exhume les créatures préhistoriques de leurs sépulcres sous les yeux éberlués des spectateurs. A l'origine de cette prouesse technique, on retrouve Willis O'Brien, l'artiste thaumaturgique de la stop-motion (image par image). Par ailleurs, ce dernier sera derechef rappelé pour officier derrière les effets spéciaux et visuels de King Kong. Mutin, Willis O'Brien affine et peaufine la technique de la stop-motion.
Pour le reste, Le Monde Perdu obéit à une trame scénaristique des plus élémentaires. Une expédition est dépêchée sur une île inexplorée de l'homme.
C'est dans cette contrée, à la fois archaïque et luxuriante, que nos aventuriers vont devoir se colleter avec une nature hostile. L'homme est prié de retourner dans les tréfonds de la chaîne alimentaire. Ptérodactyles, brontosaures, diplodocus et autres stégosaures font partie des animosités ambiantes et ornementent un monde tribal et archaïque. Parmi ce bestiaire voluptuaire, se tapit un autre prédateur, d'une redoutable célérité : le tyrannosaure. C'est cet animal, à l'appétit pantagruélique, qui constitue la star prédominante du film. Après moult pérégrinations, le célèbre carnivore se retrouvera dare-dare dans notre société hédoniste et consumériste. Affamé, le tyrannosaure décimera plusieurs buildings et tortorera des victimes d'infortune. Ce scénario simplissime et lapidaire sera également le principal didactisme de King Kong. Là aussi, il est question d'une expédition savamment fomentée qui conduit des aventuriers sur une île, Skull Island.
Seule dissimilitude et pas des moindres, le tyrannosaure carnassier est suppléé par un gorille de taille cyclopéenne. Le primate colossal sera lui aussi capturé, puis lâché malencontreusement dans la ville. Contrairement au tyrannosaure, le gorille aux étonnantes rotondités présente un visage humain. Ce dernier s'accointe et s'acoquine avec une jolie blondinette. C'est sur ce syllogisme laconique que Le Monde Perdu et King Kong vont inspirer et engendrer toute une pléthore de succédanés. Les thuriféraires de ce registre cinématographique n'omettront pas de stipuler des oeuvres telles que Le monstre des temps perdus (Eugène Lourié, 1953), Godzilla (Ishiro Honda, 1954), Rodan (Ishiro Honda, 1956), La Guerre des Monstres (Ishiro Honda, 1966), Mothra (Ishiro Honda, 1961), ou encore La planète des monstres (Jun Fukuda, 1967) par les longs-métrages notables et éventuellement notoires.
Corrélativement, le roi Kong se transmute à son tour en une saga lucrative et mercantiliste. Bien conscients de cet épiphénomène, Ernest B. Schoedsack et Merian C. Cooper réalisent une suite soporative, Le Fils de Kong (1933), dans la foulée du premier volet. Viennent également s'agréger King Kong contre Godzilla (Ishiro Honda, 1962), King Kong s'est échappé (Ishiro Honda, 1967), Queen Kong (Frank Agrama, 1976), King Kong revient (Paul Ledder, 1976), King Kong 2 (John Guillermin, 1986), Konga (John Lemont, 1961), Kinky Kong (John Lemont, 2006), ou encore King of the lost world (Leigh Scott, 2005). Corrélativement, le King Kong de 1933 a connu deux nouveaux remakes éponymes, respectivement diligentés par John Guillermin en 1976 et par Peter Jackson en 2005. Le phénomène King Kong n'est donc pas prêt de s'estomper.
Preuve en est avec Kong - Skull Island, réalisé par les soins de Jordan Vogt-Roberts en 2017. Ce nouvel avatar n'est ni un remake ni une suite des précédents chapitres consacrés au roi Kong, mais plutôt une séquelle, voire une aventure subalterne. Dès le départ, le long-métrage annonce ses véritables velléités. Kong - Skull Island n'a pas vraiment pour aspérité de s'inscrire dans le sillage et le continuum de ses illustres antécesseurs. L'objectif sera donc de proposer un blockbuster jubilatoire et décérébré. En l'occurrence, Kong - Skull Island remplira aisément sa gageure et se soldera par un succès pharaonique lors de son exploitation dans les salles obscures.
Dans l'ensemble, nonobstant une certaine pondération de circonstance, les critiques se montrent plutôt affables et dithyrambiques.
Reste à savoir si ce métrage d'aventure et fantastique mérite - ou non - de tels plébiscites et satisfécits. Réponse à venir dans les lignes de cette chronique... La distribution de Kong - Skull Island se compose de Tom Hiddleston, Samuel L. Jackson, Brie Larson, John C. Reilly, John Goodman, Corey Hawkins, John Ortiz, Jing Tian, Tobby Kebbell, Jason Mitchell, Shea Whigham et Thomas Mann. Attention, SPOILERS ! (1) En 1944, alors que la guerre du Pacifique fait rage, deux pilotes s'écrasent sur une île inconnue. L'un est Américain, l'autre est Japonais. Alors qu'ils s'affrontent sur place, ils sont brusquement interrompus par une gigantesque créature...
En 1973, William Randa monte tant bien que mal une équipe d'explorateurs pour se rendre sur une île reculée de l'océan Pacifique, surnommée Skull Island (« l'île du crâne » découverte grâce au programme Landsat.
Mais personne ne sait que l'île en question est le repaire de multiples monstres, dont le légendaire King Kong... (1) Indubitablement, Kong - Skull Island signe la résurgence des films de monstres géants des années 1970. Là aussi, pas question de s'appesantir sur un scénario famélique, ni de ratiociner sur des personnages humains encore plus faméliques. Le but est donc de revenir à la genèse et probablement au brio du légendaire "Monsterverse". En résumé, Kong - Skull Island peut s'enhardir de proposer un plantureux bestiaire.
Evidemment, le roi Kong fait partie des inimitiés. Mais d'autres créatures titanesques et gargantuesques viennent également remplir doctement leur office. Formellement, Kong - Skull Island est techniquement irréprochable.
Mieux, ce blockbuster, plutôt soyeux, propose des teintes irisées et se pare d'une bande son "hard rock" pour mieux sonner le tocsin des belligérances à venir. Indiscutablement, Jordan Vogt-Roberts connaît parfaitement sa copie et cite plusieurs références proéminentes, notamment Apocalypse Now (Francis Ford Coppola, 1979) dans sa débauche d'action, de militaires aguerris et d'hélicoptères vrombissant. Par d'habiles matoiseries, le metteur en scène finaud n'a pas oublié ces vieilles productions obsolescentes. Sur la forme, Kong - Skull Island s'approxime à une nouvelle version de Rodan, mais avec beaucoup plus de luminescence et d'opulence.
Niveau action, le film flagornera sans doute les néophytes, ainsi qu'un public peu exigeant en termes de qualité cinématographique. Hélas, Kong - Skull Island n'est pas exempt de tout grief. Dans l'ensemble, l'intrigue reste beaucoup trop académique. En sus, les protagonistes humains ne sont que des figures archétypales et constituent au mieux du menu fretin. Dans cette frénésie de pugilats, même King Kong a toutes les peines du monde à transparaître. Certes, le gorille luxuriant impressionne toujours autant par sa stature et sa robustesse. Malencontreusement, Kong - Skull Island s'apparente, in fine, à un blockbuster aseptisé et digne des dernières productions hollywoodiennes en date. Reste un blockbuster plutôt avenant et sympathique, sans doute légèrement supérieur à la moyenne habituelle, mais un peu trop falot pour susciter notre appétence dans nos colonnes.
Note : 12/20
Alice In Oliver
(1) Synopsis du film sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Kong:_Skull_Island