godzilla 2 roi des monstres

Genre : science-fiction
Année : 2019
Durée : 2h12

Synopsis : L'agence crypto-zoologique Monarch doit faire face à une vague de monstres titanesques, comme Godzilla, Mothra, Rodan et surtout le redoutable roi Ghidorah à trois têtes. Un combat sans précédent entre ces créatures considérées jusque-là comme chimériques menace d'éclater. Alors qu'elles cherchent toutes à dominer la planète, l'avenir même de l'humanité est en jeu… 


La critique :

Non, à travers cette chronique, nous ne commettrons pas l'offense de réitérer la genèse du film de monstres. Nous éluderons donc l'écueil d'itérer l'historique de cette appétence pour ces dinosaures et la période paléontologique. Non, ce n'est pas King Kong (Ernest B. Shoedsack et Merian C. Cooper, 1933) qui acte et officialise la naissance de sous-registre du cinéma fantastique, mais Le Monde Perdu (Harry O'Hoyt, 1925). Pour la première fois à l'écran, les diplodocus, les stégosaures, les ptérodactyles et d'autres reptiliens plantureux réapparaissent sous les yeux éberlués des spectateurs. Mais la vedette sérénissime de ce spectacle en stop-motion (image par image) se nomme le tyrannosaure.
C'est un certain Willis O'Brien qui diligente les opérations, ainsi que les effets spéciaux et visuels. Ce dernier va devenir le technicien démiurgique de la stop-motion, avant de céder sa place - quelques décennies plus tard - à Ray Harryhausen.

Que soit. Après la Seconde Guerre mondiale et surtout après la catastrophe engendrée par les bombes atomiques qui ont dévasté les villes de Nagasaki et d'Hiroshima, le monde entier est plongé dans la terreur. Cette peur irréfragable de la bombe nucléaire est préfigurée par l'apparition d'une nouvelle créature. Cette dernière n'est pas un dinosaure émanant de la Préhistoire, mais un pur "produit" (si j'ose dire) des radiations nucléaires. Tel est, par ailleurs, le constat dogmatique d'Ishiro Honda via Godzilla (1954). King Kong peut trembloter et vaciller de son trône voluptuaire.
Contrairement au roi des singes, Godzilla n'est pas mû par la technique de la stop-motion, mais par un comédien affublé des oripeaux hétéromorphes de la créature. Dixit les propres aveux d'Ishiro Honda, son long-métrage s'inspire de Le Monstre des Temps Perdus (Eugène Lourié, 1953).

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Si King Kong symbolisait cet effroi de la crise de 1929, Godzilla personnifie cette peur intangible de la Guerre Froide et plus largement d'une troisième guerre mondiale putative. Le kaiju eiga est né. Littéralement, ce néologisme signifie "cinéma de bête étrange" (Source : https://www.senscritique.com/liste/Le_Kaiju_Eiga/91470). En raison de son succès inopiné qui traverse ses frontières asiatiques, Godzilla influence et génère toute une pléthore d'épigones. Les thuriféraires de kaiju eiga n'omettront pas de stipuler des oeuvres telles que Gamera (Noriaki Yuasa, 1965), Ghidra, le monstre à trois têtes (Ishiro Honda, 1964), Invasion Planète X (Ishiro Honda, 1965), Les envahisseurs attaquent (Ishiro Honda, 1968), ou encore Mothra (Ishiro Honda, 1961) parmi les longs-métrages notables et éventuellement notoires.

Quant à Godzilla premier du nom, le film s'arroge le statut de classique et se transmute en une franchise lucrative et mercantiliste. C'est ainsi que Le Retour de Godzilla (Koji Hashimato, 1984), Le Fils de Godzilla (Jun Fukuda, 1967), Godzilla's Revenge (Ishiro Honda, 1969), Godzilla versus Megalon (Jun Fukuda, 1973), ou encore Godzilla Final Wars (Ryûhei Katamura, 2004) signeront la quintessence de la créature gargantuesque sur le cinéma de science-fiction en général, et dans sur le film de monstres en particulier. Mieux, le film de 1954 n'échappe pas au remake hollywoodien. Le Godzilla (1998) de Roland Emmerich ne restera pas vraiment dans les annales du noble Septième Art. Mais cette nouvelle version ameute paradoxalement les foules dans les salles.
A contrario, les adulateurs originels brocardent et vilipendent ce remake digressif et obsolescent.

L'idée d'un reboot ou d'une séquelle émerge dans la tête de certains producteurs. Ainsi, en 2014, Godzilla se rachète une nouvelle gloriole sous l'égide et l'omniscience de Gareth Edwards. Si ce kaiju eiga ne rivalise pas avec la version de 1954, il fait au moins voeu d'allégeance au kaiju eiga. Néanmoins, certains aficionados de la première heure fulminent. Godzilla est trop peu présent à l'écran et le film se polarise beaucoup trop sur ses protagonistes humains. Via Godzilla 2 - Roi des Monstres, réalisé par la diligence de Michael Dougherty en 2019, l'objectif est de phagocyter cette carence.
A la fois acteur, producteur, monteur, cinéaste et scénariste, Michael Dougherty signe son tout premier film, Season's Greatings, en 1996. 
Il enchaîne à postériori avec Refrigerator Art (1996), Deadtime Stories (1998), Trick'R Treat (2008), Calling All Robots (2010) et Krampus (2015).

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A l'instar de son auguste devancier, Godzilla 2 - Roi des Monstres reçoit un accueil plutôt mitigé. Cette fois-ci, les critiques vitupèrent la profusion de créatures à l'écran. Sur la forme, Godzilla 2 - Roi des Monstres est un kaiju eiga avec ses arguties, mais aussi avec ses propres défectuosités. La distribution de ce second opus se compose de Kyle Chandler, Vera Farmiga, Charles Dance, Ken Watanabe, Sally Hawkins, Millie Bobby Brown, Bradley Whitford, Thomas Middleditch, CCH Pounder, O'Shea jackson Jr. et Joe Morton. Attention, SPOILERS ! (1) L'agence crypto-zoologique Monarch déploie de nombreux moyens pour combattre des créatures de tailles divines, appelées Titans.
Ces derniers réapparaissent petit à petit des entrailles de la terre. La paléobiologiste 
Emma Russell, travaillant pour Monarch, a été traumatisée par la mort de son fils Andrew en 2014.

Elle a mis au point l'Orca, jadis imaginé avec son ex-mari Mark, une machine qui permet de capter et reproduire les signaux émis par les Titans. Son invention attire des convoitises. Emma entraine avec elle sa fille Madison. Son père, Mark va tout faire pour retrouver sa fille, tout en tentant de survivre dans un monde envahi de monstres. Godzilla va ainsi devoir compter sur une alliée, le papillon géant Mothra pour affronter les 2 menaces que représentent le ptérosaure super-rapide Rodan, ainsi que son pire ennemi, le dragon à trois têtes King Ghidorah, qui est l'Alpha des Titans.
Ces anciennes super-espèces veulent toutes la suprématie et mettent en danger la survie de l'humanité
. Alors qu'un combat apocalyptique se prépare, Godzilla, seul prétendant au titre capable de rivaliser avec l'Alpha, aidé des humains, devra s'imposer et ainsi affirmer sa place en tant que roi des monstres (1).

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Autant l'annoncer sans ambages. Les amateurs patentés de kaiju eiga seront en terrain connu et quasiment conquis. Oui, Godzilla 2 - Roi des Monstres remplit doctement son office en matière de pugilats titanesques. Indubitablement, les techniciens des effets visuels prodiguent un certain raffinement à un bestiaire de créatures somptuaires et gargantuesques. Oui, Godzilla 2 - Roi des Monstre atteint sa quintessence lorsqu'il se centre sur ses rixes interminables, à tel point que l'on pourrait légitimement invoquer un nouveau choc des titans. Dans cette série de heurts et d'échauffourées, c'est évidemment Godzilla qui est appelé à revêtir le sceptre du monstre hégémonique. 
Pour y parvenir, il devra néanmoins s'empoigner et ferrailler avec King Ghidorah, une sorte de dragon à trois têtes, et quasi invulnérable.

Sur ces entrefaites, Godzilla 2 - Roi des Monstres se permet d'introspecter sur les lois infrangibles de la nature. Un jour ou l'autre, une espèce dominante (ici, les hommes) est priée de disparaître au profit d'une nouvelle (ou ancienne...) forme de vie terrestre (voire extraterrestre...). Bon gré mal gré, Godzilla 2 - Roi des Monstres épouse la dialectique darwinienne sur l'évolution des espèces. Cependant, cette cogitation aurait mérité un bien meilleur étayage. Godzilla 2 - Roi des Monstres n'est pas exempt de tout grief, loin de là. Cette fois-ci, les personnages humains ne présentent qu'un intérêt relatif. Derechef, ce blockbuster s'immisce sur le sujet spinescent de la famille avec ses relations qui se nouent et se dénouent entre une jouvencelle et sa propre parentèle.
Cette suite souffre donc d'un scénario anémique et réverbère, in fine, l'apathie du cinéma hollywoodien actuel. Seule consolation, Godzila 2 - Roi des Monstres fait montre d'obédience à un genre (le kaiju eiga) qu'il révère, déifie et sacralise. On exhortera alors les producteurs à cesser hâtivement les belligérances, plutôt que de s'échiner à financer des suites absconses et soporifiques. Hélas, cette requête ne sera pas ouïe par l'oligarchie hollywoodienne puisqu'un King Kong contre Godzilla est d'ores et déjà annoncé...

 

 

Note : 12/20

sparklehorse2 Alice In Oliver 

(1) Synopsis du film sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Godzilla_2_:_Roi_des_monstres