Genre : Horreur, gore, trash, slasher (interdit aux - 18 ans selon certaines sources, interdit aux - 16 ans en France)
Année : 2007
Durée : 1h26
Synopsis : À la fin de la guerre froide, un scientifique subit de grosses pressions psychologiques de la part des deux blocs, ce qui le pousse à travailler sur un virus de la rage complètement destructeur dans le but de créer une épidémie mondiale et cela avec l'aide de cobayes humains fraichement trouvés sur son terrain. Malheureusement, l'un d'eux réussi à s'échapper, le cauchemar commence…
La critique :
Vous l'avez sans doute compris, tout du moins renâclé, supputé, voire même subodoré. Depuis quelques jours, quelques semaines, Cinéma Choc se polarise sur l'univers des zombies décrépits. Comme nous l'avions déjà stipulé lors de la chronique de Retour à Zombieland (Ruben Fleischer, 2019, Source : http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2020/04/01/37901488.html), le registre "zombiesque" s'achemine sur plusieurs mouvances et intempérances. Que les adulateurs du blog (mais enfin, qui êtes-vous ?) se rassérènent. Via ce nouveau billet chronophage, nous ne commettrons pas l'offense d'itérer la genèse ni l'historique de sous-registre du cinéma horrifique.
Néanmoins, il sied tout de même de notifier que ce registre cinématographique a connu toute une kyrielle de mouvances et d'intempérances.
Vers la fin des années 1960, George A. Romero apparaît comme l'une des figures proéminentes via La Nuit des Morts-Vivants (1968). A l'époque, cette production impécunieuse rencontre à la fois les plébiscites et les acrimonies de circonstance. D'un côté, les thuriféraires adulent et divinisent une série B digressive et iconoclaste. De l'autre, les contempteurs brocardent et admonestent un long-métrage beaucoup trop âpre et virulent. Pour George A. Romero, les zombies claudicants préfigurent avant tout cette déréliction politique et sociétale dont est victime l'Oncle Sam depuis le début de la Guerre Froide. Pour la première fois dans l'histoire du cinéma d'horreur américain, c'est un comédien Afro-Américain, un certain Duane Jones, qui tient le rôle principal.
Non seulement l'acteur en déveine devra affronter les assauts incessants de morts-vivants affamés, mais il devra également ferrailler contre l'hostilité de ses propres congénères.
A postériori, George A. Romero corroborera ce tropisme pour la parabole sociétale avec la Trilogie des Morts. Ainsi, Zombie (1978) et Le Jour des Morts-Vivants (1985) succèdent à La Nuit des Morts-Vivants. Opportuniste, George Romero poursuivra sur ce didactisme idéologique et sociétal via Le territoire des morts (2005), Chronique des morts-vivants (2008) et Le vestige des morts-vivants (2009). Mais, vers le milieu des années 1980, le public commence sérieusement à se lasser de toutes ces ellipses politiques et idéologiques. Ce dernier réclame et exige davantage de truculence. La requête est évidemment ouïe par les producteurs, et en particulier par Dan O'Bannon via Le Retour des Morts-Vivants (1985). Cette fois-ci, les zombies anthropophagiques oscillent davantage vers le gore et les rodomontades. A raison, George A. Romero fulmine.
Le Jour des Morts-Vivants est expressément phagocyté des salles obscures et en particulier par Le retour des morts-vivants, une série B qui toise les firmaments du box-office américain. La métaphore sociologique ne fait plus recette et est sommée de s'évincer au profit de la fanfaronnade. Impression accréditée par la sortie, quelques années plus tard, de Braindead (Peter Jackson, 1992). Puis, six ans plus tard, le genre "zombie" adopte un point de vue anthropocentrique avec Moi, Zombie - Chronique de la Douleur (Andrew Parkinson, 1998). Puis, encore six ans plus tard, les morts-vivants optent pour le pittoresque et la comédie égrillarde avec Shaun of the Dead (Edgar Wright, 2004).
Sur ces entrefaites, le genre "zombie" reluque incessamment vers les facéties et les goguenardises. Mais un autre courant alternatif surgit de cette pénombre évanescente.
Il s'agit, entre autres, de coaliser les zombies et la pornographie ad nauseam, une mouvance qui avait déjà connu ses tous premiers ânonnements sous l'entregent de Joe d'Amato, un autre parangon du cinéma bis. La Nuit fantastique des Morts-Vivants (1980) et Porno Holocaust (1981) ouvrent une nouvelle ère dans l'univers des zombies. Ainsi, eschatologie et lascivités se coalisent pour offrir une série de bacchanales, de stupres et de priapées. En résumé, vive la série B écervelée ! Une dialectique qui reste le principal leitmotiv des productions Grindhouse. Et c'est ce qu'a parfaitement compris Robert Rodriguez via Planète Terreur (2007), une production pharaonique qui fait justement écho au cinéma bis de jadis. Hélas, le film de Robert Rodriguez n'a pas vraiment soulevé les foules lors de son exploitation en salles. Même les critiques se montrent plutôt pondérées devant cet afflux d'hémoglobine, hélas gangréné par de nombreuses chutes de rythme.
Tout le monde ne possède par la verve d'un David E. Durston avec I drink your blood (1970) qui n'est pas vraiment un film de zombies, mais plutôt une bisserie avec des infectés totalement enragés ! Indubitablement, The Rage, réalisé par la diligence de Robert Kurtzman en 2007, affectionne et divinise les productions Grindhouse, en particulier le même I Drink Your Blood, une série B singulièrement virulente qui a laissé des réminiscences indélébiles aux laudateurs du cinéma bis. En outre, Robert Kurtzman n'est pas vraiment (du tout...) un noviciat dans l'univers cinématographique. Il a essentiellement officié en tant que maquilleur et technicien des effets spéciaux.
En tant que cinéaste, on lui doit notamment The Demolitionist (1995), Wishmaster (1997), Buried Alive (2007), ou encore Deadly Impact (2009).
En résumé, pas besoin d'être omniscient ni extralucide pour subodorer les accointances du metteur en scène avec le cinéma horrifique. Evidemment, The Rage ne déroge pas à la règle. En l'occurrence, The Rage fait partie de ces productions gore, sur fond de slasher et de torture porn, qui a écopé dans certains pays d'une interdiction aux moins de 18 ans. En France, le long-métrage de Robert Kurtzman écopera "seulement" (si j'ose dire...) d'une interdiction aux moins de 16 ans. Certes, The Rage est affublé du statut - peu enviable - de série B impécunieuse. Pourtant, contre toute attente, le film est reçu sous les vivats et les acclamations de la presse spécialisée.
Reste à savoir si The Rage mérite - ou non - de telles courtisaneries. Réponse à venir dans les lignes éparses de cette chronique...
La distribution se compose d'Erin Brown, Andrew Divoff, Anthony Clark, Ryan Hooks, Sean Serino, Rachel Scheer, Christopher Allen Nelson et Regie Bannister. Attention, SPOILERS ! (1) Le Docteur Vasienlenko a une dent contre son gouvernement. Frustré, il crée dans son laboratoire l'arme biologique ultime : un type de rage qui transforme les infectés en mutants assoiffés de chair. En peu de temps, il perd le contrôle de ses sujets d'expérience et devient lui-même infecté. Le virus ne tardera pas à se propager chez les humains et les vautours des environs. Pour survivre et éviter que la rage détruise l'humanité entière, un groupe de jeunes adultes perdus dans les bois devra mettre un terme aux activités machiavéliques du docteur (1). Certes, à l'aune de cette exégèse, on n'attendait pas forcément grand-chose, ou alors peu ou prou, de cette série B subsidiaire.
Pourtant, Robert Rodriguez aurait été bien avisé de jeter un oeil attentif à ce long-métrage issu de nulle part, si ce n'est de l'imagination fertile de son auteur démiurgique. Oui, The Rage se montre beaucoup plus acariâtre que le même Planète Terreur. Oui, The Rage est un curieux maelström entre I Drink Your Blood, Re-Animator et L'île du Docteur Moreau, autant de références fastueuses que Robert Kurtzman déifie et sacralise. C'est donc The Rage qui remporte le pugilat haut la main et par K.O. s'il vous plaît ! Certes, les contempteurs et les esprits chagrins se montreront sans doute sourcilleux sur la qualité des effets spéciaux - pour le moins obsolètes - ainsi que sur certaines approximations narratives. Non, The Rage n'a rien inventé et se contente d'appliquer doctement les recettes du cinéma gore. Mais le film montre une telle munificence qu'il se laisse visionner avec un plaisir jubilatoire !
Anthropophagie, barbaques, expérimentations dissonantes et vautours à l'appétit pantagruélique font partie du menu fretin ! En résumé, les amateurs patentés du cinéma bis seront en terrain connu et quasiment conquis. Si Robert Kurtzman avait pu (avait su...) gominer toutes ces impérities, The Rage aurait pu aisément s'immiscer dans le haut du panier.
Note : 13.5/20
(1) Synopsis du film : http://cinemafantastique.net/Rage-The.html
Alice In Oliver