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Genre : Thriller, policier, giallo (interdit aux - 12 ans)

Année : 1975

Durée : 1h29

 

Synopsis :

Un maniaque vêtu de rouge s'en prend à des touristes américains venus en Espagne dans le cadre d'un voyage organisé.

 

La critique :

Je sais ce que vous pensez et je peux vous comprendre. Je peux comprendre l'énervement se traduisant dans votre coeur et se lisant sur vos lèvres. Je réalise aussi que certains commencent à arriver (ou sont déjà arrivés) à saturation. Pour les plus têtes-en-l'air, cela fait bien maintenant plusieurs mois que Cinéma Choc s'est plongé dans un périple ardu du giallo pour le bonheur de, nous l'espérons, au moins un ou deux. Haut les coeurs pour les plus réfractaires puisque la liste semble s'être clôturée car aucune nouvelle pellicule ne s'y est rajoutée depuis un petit bout de temps. Tout est une question d'accessibilité sur la Toile et si certains que je n'ai pas sont présents, les liens morts ou l'absence de seeders empêchent de les obtenir. "Chouette !" certains diront.
De toute façon, là n'est pas l'idée de faire tout le répertoire au vu de la productivité stratosphérique de l'époque qui voyaient des sorties quasiment hebdomadaires de nouveaux films dans les salles, et ce surtout durant la première moitié des années 1970. Beaucoup de trucs ne donnent pas envie d'être visionnés tant ils suintent l'amateurisme. Malgré tout, je ne promets pas qu'il n'y aura plus du tout de nouveaux gialli qui s'incrusteront dans les colonnes éclectiques du blog après la fin tant attendue de cette modeste rétrospective.

Précédemment, vous avez pu vous enorgueillir de l'arrivée de quelques cinéastes contrastant avec l'hégémonie assez décevante de Mario Bava et Dario Argento qui, s'ils sont des pontes dans leur genre, éclipsent à mon sens un peu trop les autres qui n'ont pas vraiment bénéficié d'une aussi belle mise en lumière. On l'a vu, certains n'avaient pas du tout à rougir face à eux comme ce fut le cas de Massimo Dallamano qui rivalisait avec panache avec les grands classiques de nos deux auteurs susmentionnés. Sergio Martino fut aussi un esthète à retenir mais c'est plus ou moins tout vu que nous n'avons pas (oui, oui !) encore creusé suffisamment chez certains qui sont encore plus confidentiels aux yeux du grand public, mais ça viendra ! Bref, dans la dernière chronique, vous découvriez, ou plutôt redécouvriez, Umberto Lenzi, qui fut en son temps l'un des plus prolifiques artisans italiens de la série B. Bien avant que je ne vous en parle, Cannibal Ferox et L'Avion de l'Apocalypse eurent la chance d'être chroniqués. Lenzi, c'est un peu le type qui a officié dans presque tous les genres cinématographiques, s'attirant une réputation de "nanar man". Le giallo ne put échapper à son oeil avisé, accouchant ainsi de plusieurs films "Lenziens" qui laisseront dubitatifs les cinéphiles.
Sans surprise, ce fut mon cas avec Le Tueur à l'Orchidée qui frôlait la ligne rouge au-delà de laquelle le statut de navet y aurait été attribué. Je ne fus pas surpris ceci dit et avec une certaine tolérance, je n'en restais pas là puisqu'il revient avec Chats rouges dans un labyrinthe de verre.

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ATTENTION SPOILERS : Un maniaque vêtu de rouge s'en prend à des touristes américains venus en Espagne dans le cadre d'un voyage organisé.

Je reconnais avoir une fascination assez inconsciente pour des titres aussi surréalistes que Chats rouges dans un labyrinthe de verre. Ca sonne vintage et ça titille surtout la curiosité. C'est comme ça que certains ont retenu mon attention juste par cette caractéristique aussi insignifiante qu'irrationnelle. Et puis, la beauté macabre de la pochette peut aider et là aussi, il faut attribuer un bon point à Lenzi car il est un peu là grâce à ça. Donc que nous raconte cette petite trouvaille que je fis via une liste sortie de Wikipédia ? Il est clair que beaucoup de gialli ne brillent pas par leur originalité et c'est sans surprise le cas ici quand on connaît la tronche du réalisateur.
Un voyage organisé pour des touristes américains est mis à mal suite à l'incursion dans leurs vacances d'un taré tenant une arme blanche dans sa main gantée de rouge. Pourquoi pas... Ca détourne sympathiquement les codes qu'installait Mario Bava quelques années auparavant. Tuer bêtement les pauvres et plantureuses femmes n'intéresse pas l'assassin qui prélèvera après chaque méfait l'oeil gauche du macchabée, laissant un peu la police dans l'embarras face à ces atrocités, et surtout un vieil inspecteur aux cheveux blancs qui comptait prendre sa retraite avant que cette affaire ne se produise.

On pourrait s'attendre à ce que l'individu derrière ça soit un espagnol américanophobe (si ce terme existe...) un peu cinglé mais on apprend qu'un crime similaire eut lieu jadis près de la maison de Mark, l'un des touristes, qui devient vite soupçonné au vu de ses antécédents mentaux. Ce petit city-trip devient alors un lieu de paranoïa, certains se soupçonnant au fur et à mesure de l'accumulation des meurtres tout aussi barbares. La grande question pour moi était de savoir si j'allais passer une bien meilleure séance que celle devant Le Tueur à l'Orchidée. Sans surprise oui. Néanmoins, ce n'est pas très jojo vu les tares d'un récit qui, s'il est plus rythmé et stimulant que son grand frère, a toujours un mal de chien à nous tenir attentif sur toute la durée.
Le cinéaste a une véritable appétence pour les facondes sans intérêt qu'il ne peut s'empêcher de mettre çà et là, ceci dit en moindre quantité comparé à l'Orchidée Insipide. On développe des rapports sociaux entre touristes dont l'on se fout royalement, des petites histoires bateaux qui n'intéressent personne sinon le réalisateur lui-même. Ca mine l'intensité qui aurait pu être de qualité certaine sans ces mauvais choix de narration.

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Autre point qui fâche, c'est l'absence de toute exploration du symbolisme de l'oeil. Il est relégué au rang de simple accessoire factice sans creuser plus loin dans son utilité, sa capacité à percevoir les choses. Instrument parfait du voyeurisme, il aurait pu être mieux mis en valeur. Ici, il est bêtement prélevé du globe oculaire pour apprendre par la suite qu'il se réfère à un trauma infantile qui est la cause de ces énucléations vengeresses. Du déjà-vu qui est couplé à un manque flagrant de consistance pour faire de Chats rouges dans un labyrinthe de verre une surface plane qui ne va jamais plus loin que ce que la caméra filme. Talent de faiseur d'oeuvres de série B oblige, on n'échappe pas à toute une batterie de grosses ficelles scénaristiques, d'incohérences en tout genre, de mauvais choix de mise en scène qui mitraillent la crédibilité. L'apparition impromptue et trop facile de personnages en est le meilleur exemple comme dans cette séquence où une fille tombe dans une piscine, crie à l'aide deux fois pour ramener une troupe d'hommes qui l'ont visiblement entendu alors qu'une réception tonitruante se faisait dans le manoir. Ce genre de procédé ne peut pas passer avec moi.
Reste que Lenzi a ce mérite qu'on ne peut lui enlever d'être efficace dans les scènes d'assassinat. Le luna-park peut sans conteste se hisser comme le meilleur passage du film. 

Pour ce qui est des qualités esthétiques du titre, franchement ça va. On a déjà vu pire mais on a déjà vu aussi largement mieux. Pas de quoi grimper aux rideaux. Les paysages espagnols sont agréables à contempler, malgré l'absence totale de travail sur le visuel. On retrouve toujours ces rapides zooms sur le visage qui sont une caractéristique type du giallo dont, personnellement, je n'ai jamais été très fan, bien que ça ne me dérange pas quand c'est bien utilisé et avec parcimonie. Mais bon tant que la caméra n'est pas imbuvable et ne rend pas l'action illisible, c'est le principal. Pour la bande son, on est également dans le positif, malgré une utilisation abusive qui ne plaira pas à tout le monde. Enfin, que dire des acteurs si ce n'est que l'on y croit très difficilement.
Si certains se débrouillent, d'autres ne semblent pas être impliqués dans le projet. On a aussi cette impression qu'ils ne semblent pas plus que ça effrayés par les crimes, alors que pour un être humain normal, ça ne le laisserait aucunement indifférent, surtout quand on est une personne à risque de se retrouver l'oeil en moins avec l'exécution sommaire en bonus. Dans mon infinie mansuétude, je citerai Martine Brochard, John Richardson, Ines Pellegrini, Andres Mejuto, Mirta Miller, Daniele Vargas, George Rigaud et Silvia Solar

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Il faut le dire, Chats rouges dans un labyrinthe de verre n'est pas une purge, ni un navet. Son concept est appréciable, les idées étaient là et le potentiel était de la partie. Sauf qu'avec Lenzi derrière, il ne fallait pas s'attendre à un matériau recherché, intelligent et fascinant à décortiquer. Tout reste sommaire dans son cahier de charges qui manque cruellement de maturité. J'en reviens à ce que je disais sur l'oeil qui, avec un peu de réflexion, aurait su donner un truc génial si un second niveau de lecture aurait répondu présent. A notre grand dam, ce ne fut pas le cas mais c'était plus que prévisible. Pour assombrir le tableau, un manque de rythme se fait ressentir, bien que nous devions souligner que la trame narrative est plus palpitante que l'Orchidée Insipide.
Il est vrai que l'on me rétorquera que c'est un giallo de catégorie B et qu'il faut être magnanime sur la question car il ne correspond pas aux attentes de chacun. Je peux comprendre, sauf que certaines oeuvres de série B parviennent à ne pas être crétines, en plus de nous offrir un visionnage palpitant. Ce ne fut pas vraiment le cas de Chats rouges dans un labyrinthe de verre qui ne suscitera guère qu'un ennui poli par son inégalité qui en est son fer de lance.

 

Note : 09/20

 

 

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