disaster artist

Genre : comédie, comédie dramatique, biopic 
Année : 2017
Durée : 1h44

Synopsis : En 2003, Tommy Wiseau, artiste passionné mais totalement étranger au milieu du cinéma, entreprend de réaliser un film. Sans savoir vraiment comment s'y prendre, il se lance … et signe The Room, le plus grand nanar de tous les temps. Comme quoi, il n'y a pas qu'une seule méthode pour devenir une légende ! 

 

La critique :

C'était le 19 septembre 2018. Cinéma Choc abordait à la fois un nanar de luxe et un OFNI (objet filmique non identifié) qui avaient laissé quelques réminiscences indélébiles. Oui, vous l'avez sans doute supputé et même subodoré... Il s'agit de The Room (Source : http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2018/04/19/36259460.html), réalisé par la diligence (hum...) de Tommy Wiseau en 2003. A l'instar de Citizen Kane (Orson Welles, 1946) sorti quelques décennies plus tôt, The Room est la subséquence de la mégalomanie de son auteur. Tommy Wiseau ne se contente pas de superviser les opérations.
Tour à tour acteur, scénariste, producteur, monteur et photographe, l'auteur impétueux s'illustre ici par son égotisme primaire.

C'est probablement la raison pour laquelle le tournage de The Room est encore aujourd'hui émaillé par les rumeurs, les ragots et les galéjades. 
Car Tommy Wiseau ne se prend pas seulement pour le nouvel Orson Welles. L'artiste prétentiard cite également Alfred Hitchcock ou encore Steven Spielberg parmi ses références. Au mieux, Tommy Wiseau concourt dans le même sérail qu'Ed Wood, soit le "pape" de la série Z. The Room serait une sorte de Plan 9 From Outer Space, mais version sitcom amoureuse. En sus, ce long-métrage n'a pour velléité d'épouser le prisme de la science-fiction et vogue davantage vers l'oaristys amoureux. Contre toute attente, cette fumisterie sur pellicule sera acclamée par les vivats d'un public hilare lors de sa première présentation en salles.
Mais l'audimat n'est pas dupe. Il discerne l'aspect funambulesque, voire parodique. 

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Tout d'abord dépité, Tommy Wiseau assiste, éberlué, aux sarcasmes de ses contempteurs. A l'origine, l'auteur croyait ingénument avoir réalisé le nouveau Citizen KanePlus de quinze ans sa sortie, The Room continue de tarauder, que ce soit sur son financement ou sa conception originelle. Plusieurs millions de dollars seront déboursés et toujours aux frais de Tommy Wiseau. Comment ce vulgaire trublion a-t-il pu cornaquer cette production de plusieurs millions de dollars, surtout délestée du moindre financeur ? Et puis, certaines critiques circonspectes s'interrogent à leur tour sur les véritables origines, ainsi que sur certaines déclarations (affabulations...) mensongères de Tommy Wiseau. Rien que son nom et son personnage demeurent une énigme.
La fiche Wikipédia du réalisateur (Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tommy_Wiseau) sur son parcours hétéroclite.

Selon certaines informations, Tommy Wiseau serait originaire de Pologne, mais il aurait aussi vécu en Allemagne, puis en France, avant d'épouser le rêve américain. Même son âge reste sujet à la polémique. Quant à The Room, cette comédie amoureuse est la conséquence des facéties et des divagations de son auteur. Conçu comme une sorte de Citizen Kane dramatique et mélancolique, The Room s'approxime à l'idéologie du vide. Chutes de raccord, personnages archétypaux et anémiques, dialogues sirupeux et approximations sont les principaux leitmotivs de cet OFNI dégingandé. Toujours est-il que le film suinte non seulement l'inanité et la vacuité, mais The Room reflète également les élucubrations d'un réalisateur à la fois furibond, intenable et capricieux.
En raison de cette légende qui auréole le tournage et la conception du long-métrage, The Room s'est octroyé le statut de film culte.

Le métrage est même devenu l'une des nouvelles effigies du site Nanarland (source : http://www.nanarland.com/Chroniques/chronique-room-the-room.html). Pis, à l'instar de Plan 9 From Outer Space quelques décennies auparavant, The Room s'arroge le titre du plus mauvais film de toute l'histoire du cinéma. Il était donc temps de faire voeu d'allégeance à cette pitrerie fomentée sur pellicule. Tel est le principal apanage de The Disaster Artist, réalisé par la diligence de James Franco en 2017. A l'origine, le film est l'adaptation d'un opuscule éponyme, écrit et griffonné par les soins de l'acteur et producteur de Greg Sestero.
Dans ce livre, l'artiste narre les pérégrinations de Tommy Wiseau pour parvenir à tourner The Room. The Disaster Artist prend donc les allures d'un biopic et d'une comédie dramatique. 

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En outre, le métrage se soldera à la fois par une pluie de dithyrambes et toute une pléthore de récompenses, notamment le prix "Coquille d'or" lors du festival international du film de Saint-Sébastien (Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Disaster_Artist). Reste à savoir si The Disaster Artist mérite - ou non - de telles courtisaneries. Réponse à venir dans les lignes éparses de cette chronique... A la fois cinéaste, écrivain, scénariste et comédien, James Franco est devenu l'une des figures iconiques du sérail hollywoodien. En tant que réalisateur, James Franco va signer plusieurs documentaires et courts-métrages afin de s'aguerrir derrière la caméra. On lui doit - entre autres - Tandis que j'agonise (2013), Child of God (2013), The Sound of the Fury (2014), Les Insoumis (2016), The Institute (2017), ou encore Future World (2018). A ce jour, The Disaster Artist reste donc son long-métrage le plus proverbial, tout du moins en tant que metteur en scène.

La distribution du film se compose de Dave Franco, James Franco (donc à la fois devant et derrière la caméra), Seth Rogen, Ari Graynor, Alison Brie, Jacki Weaver, Zac Efron, Josh Hutcherson, June Diane Raphael, Megan Mantzoukas. Viennent également s'additionner les participations de Sharon Stone, Melanie Griffith, Judd Apatow, Tommy Wiseau "himself" et J.J. Abrams. Attention, SPOILERS ! (1) En 1998, Greg Sestero est un jeune Américain qui rêve de devenir un acteur célèbre. Dans le cadre d'un cours de théâtre, il rencontre Tommy Wiseau, un homme énigmatique et passionné qui semble habité par les mêmes désirs bien qu'il ignore tout de l'industrie du cinéma.
Devenant rapidement amis, ils décident de tout faire pour réaliser leurs rêves en s'installant à Los Angeles, où Wiseau possède déjà un appartement.

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Bénéficiant d'une grande fortune aux origines mystérieuses, Wiseau finit par se lancer dans l'écriture et la réalisation de son propre film, dans lequel il compte donner les rôles principaux à Greg et à lui-même. Embauchant eux-mêmes les techniciens et interprètes du film, et achetant le matériel nécessaire au lieu de le louer, les deux hommes filment donc The Room, dans des conditions parfois chaotiques à cause du caractère particulier de Wiseau et de son manque d'expérience. Malgré leurs promesses mutuelles, la relation se tend progressivement entre les deux amis, même si le tournage va à son terme. Ayant pris un temps ses distances après la fin du tournage, Sestero finit par accepter, à contre-cœur, de venir à l'avant-première du film (1). Qu'on le veuille ou non, The Room reste l'un des nanars, si ce n'est le "nanar", le plus populaire aux Etats-Unis.

Evidemment, cet épiphénomène a totalement échappé à nos contrées hexagonales en raison de la même confidentialité de The Room, tout du moins en dehors de ses frontières américaines. Car il s'agit bien d'un phénomène américain, ni plus ni moins. Non, le rêve américain n'est pas mort. Telle semble être l'une des thématiques prédominantes de The Disaster Artist. En résumé, n'importe quel histrion peut connaître indécemment son instant de gloriole ; à condition - tout de même - de déverser l'intégralité de sa pécune. Mais, en dépit de son succès relatif, The Room n'est pas ce nouvel Plan 9 From Outer Space, décrié par la presse américaine.
De même, Tommy Wiseau n'est pas le nouvel Ed Wood. Le score est à la fois rédhibitoire et sans appel : Ed Wood : 1/Tommy Wiseau : 0.

Toutefois, la grande réussite de The Disaster Artist réside dans ce jeu de mime et même de pantomime, savamment fomenté et orchestré par James Franco. L'auteur omniscient n'est plus seulement comédien ni réalisateur. Il est Tommy Wiseau et relate - avec beaucoup de componction et de brio - les extravagances de l'artiste fanfaron. Pourtant, lors d'une première demi-heure assez sporadique, le film se cherche, louvoie et est victime (partiellement) de ses propres atermoiements. Puis, vient le tournage de The Room, soit le point d'acmé de The Disaster Artist, jusqu'à la projection finale, elle aussi en apothéose. A défaut de revêtir les oripeaux d'un grand film, The Disaster Artist reste au moins un bon film, en tout cas un biopic attachant et sincère. Oui, cette comédie dramatique mérite amplement sa place et son érection dans les coursives de Cinéma Choc. C'est donc sur cette chronique que le blog clôt le cas de Tommy Wiseau, à moins que l'artiste (calamiteux) ne réapparaisse - un jour l'autre - dans un nouveau nanar biscornu...

 

Note : 14/20

sparklehorse2 Alice In Oliver