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Genre : horreur, épouvante, slasher (interdit aux - 12 ans)
Année : 2017
Durée : 1h27

Synopsis : Ruth est enceinte de sept mois et, comme de nombreuses futures mères pendant leur grossesse, elle croit pouvoir entendre la voix de son bébé qui s’adresse à elle. À la différence près que sa progéniture l’encourage sur la voie de la folie meurtrière. Portant encore le deuil de son mari disparu quelques mois plus tôt, Ruth accepte d’être formée aux techniques létales par son bambin très persuasif. Elle se lance alors dans une virée sanglante afin d’élimine toute personne amenée à la côtoyer, du propriétaire d’une animalerie au DJ d’un club, en passant par une femme d’affaires solitaire. En plein carnage, le ventre arrondi de Ruth lui sert de parfait alibi : après tout, qui pourrait suspecter d’être une meurtrière sans pitié une femme enceinte au si doux visage ? 

La critique :

Lorsque l'on invoque le slasher, on songe invariablement aux sagas Vendredi 13, Halloween, Massacre à la Tronçonneuse, Chucky et A nightmare on Elm Street. Si la genèse de ce registre cinématographique acte et officialise sa naissance via Black Christmas (Bob Clark, 1974), on décèle déjà les tous premiers rudiments et les linéaments avec Le Voyeur (Michael Powell, 1960) et Psychose (Alfred Hitchcock, 1960). Mais c'est bien Black Christmas qui impose et érige la figure sociopathique du croquemitaine en amalgamant huis clos, horreur et home invasion anxiogène.
Narquois, John Carpenter réitérera peu ou prou le même syllogisme analogique via Halloween, la nuit des masques (1978). Seule dissimilitude et pas des moindres, le croquemitaine n'a pas vraiment de faciès et incarne le mal absolu.

Factieux et turpide, Michael Myers préfigure cette menace indicible qui vient subrepticement occire et assaillir des étudiants peu farouches. Seule la jolie Laurie Strode, une adulescente pudibonde, échappe de justesse au courroux du psychopathe écervelé. On retrouve également cette pruderie ostentatoire à travers A Nightmare on Elm Street et Vendredi 13. Dans le cas de Vendredi 13 (Sean S. Cunningham, 1980), les animosités se déroulent à la lisière de Crystal Lake. Cette fois-ci, le croquemitaine étrille et estampe des étudiants gouailleurs et ripailleurs.
Narquois, Sean S. Cunningham s'échine à mettre en exergue un tueur en série indicible et énigmatique. Ce dernier n'est autre que Madame Voorhees, une matriarche sévèrement courroucée depuis le décès de son fils Jason.

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Le corps de l'adulescent monstrueux git quelque part dans les tréfonds de Crystal Lake. Suite au succès pharaonique du premier Vendredi 13, il était logique que le jouvenceau revienne d'entre les morts pour étriller - à son tour - la caste estudiantine. Tel sera, par ailleurs, le principal apanage des chapitres consécutifs. Jason Voorhees devient une figure iconique du cinéma d'horreur. Et peu importe si le célèbre boogeyman est empalé, démembré, écartelé, anatomisé ou encore tuméfié. Durant les années 1980, le slasher est au faîte de sa gloire. 
A leur tour, Michael Myers, Freddy Krueger et autres Leatherface se délectent de jeunes éphèbes qu'ils estampent et étrillent avec une jubilation à peine dissimulée. Corrélativement, le public commence déjà se lasser de ces pellicules peu ou prou analogiques.

Dès la fin des années 1980, le slasher est en berne et peine à retrouver ses lettres de noblesse de naguère. Et c'est ce qu'a parfaitement compris Wes Craven. Plus personne ne semble en mesure de raviver un genre en désuétude. Alors autant s'ébaudir de ces mêmes préceptes qui ont marqué la quintessence du slasher entre la fin des années 1970 et le milieu des années 1980. C'est dans cette nouvelle dialectique que s'inscrit Scream (Wes Craven, 1996), un film d'épouvante qui fait voeu d'obédience à Halloween, la nuit des masques et autres Vendredi 13
La recette se révèle fructueuse, à tel point que Scream se transmute à son tour en saga opulente via trois nouveaux chapitres consécutifs. Mieux, le long-métrage de Wes Craven se décline en slasher prépubère via les succès concomitants d'Urban Legend (Jamie Blanks, 1999) et de Souviens-toi... L'été dernier (Jim Gillespie, 1997).

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Toutefois, rien de neuf à l'horizon si ce n'est que le slasher se contente de psalmodier les bonnes recettes de jadis. Etait-il possible d'inventer une nouvelle formule et de redorer le blason de ce registre rébarbatif, voire tautologique ? Oui, semble rétorquer Alice Lowe avec Prevenge, sorti en 2017. En raison de son statut de long-métrage indépendant, Prevenge n'a pas bénéficié d'une distribution dans les salles obscures, tout du moins dans nos contrées hexagonales. Prevenge est donc condamné à se départir par l'entremise du streaming, des festivals et du DTV (direct-to-video). Contrairement aux slashers habituels, Prevenge ne repose pas sur un croquemitaine emblématique.
Ici, le boogeyman n'est autre qu'une parturiente nantie d'affabulations sociopathiques, à tel point que l'on pourrait invoquer une sorte de psychopathie hallucinatoire.

La distribution de ce slasher se compose d'Alice Lowe (donc, à la fois devant et derrière la caméra), Jo Hartley, Gemma Whelan, Kate Dickie, Kayvan Novak, Tom Davis, Dan Renton Skinner, Mike Wozniak, Tom Meeten et Eileen Davies. En l'occurrence, Prevenge se solde par des critiques unanimement panégyristes. Reste à savoir si ce long-métrage horrifique mérite - ou non - de telles courtisaneries. Réponse à venir dans les lignes éparses de cette chronique... Mais trêve de palabres et de verbiages et passons à l'exégèse du film ! Attention, SPOILERS ! Ruth est enceinte de sept mois et, comme de nombreuses futures mères pendant leur grossesse, elle croit pouvoir entendre la voix de son bébé qui s’adresse à elle. À la différence près que sa progéniture l’encourage sur la voie de la folie meurtrière.
Portant encore le deuil de son mari disparu quelques mois plus tôt, Ruth accepte d’être formée aux techniques létales par son bambin très persuasif.

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Elle se lance alors dans une virée sanglante afin d’élimine toute personne amenée à la côtoyer, du propriétaire d’une animalerie au DJ d’un club, en passant par une femme d’affaires solitaire. En plein carnage, le ventre arrondi de Ruth lui sert de parfait alibi : après tout, qui pourrait suspecter d’être une meurtrière sans pitié une femme enceinte au si doux visage ? En outre, Prevenge est le tout premier film d'Alice Lowe. L'artiste érudite fait donc office de noviciat dans le noble et Septième Art, en particulier dans le sérail horrifique. Indubitablement, Prevenge est un film probe et sincère qui propose et suscite plusieurs niveaux de lecture.
Certes, on pourrait légitimement considérer ce slasher comme les subséquences d'une dépression prénatale, avec toutes les introspections que cela inaugure.

Ce n'est pas aléatoire si Prevenge suit les pérégrinations et les susdites élucubrations de son héroïne principale. D'une jeune femme en apparence inoffensive, la mijaurée se transmue subrepticement en psychopathe revêche et acariâtre. Ces déprédations sont essentiellement ourdies et commanditées par son enfant en gestation. Tout du moins, cette analyse parcimonieuse constitue le premier niveau de lecture du film. A moins que Prevenge ne soit une métaphore sur la femme moderne. Tout au long de ses meurtres et de ses équarrissages, la forcenée assaille essentiellement la gente masculine. Cette dernière est priée de s'éteindre sous le courroux de la mégère. 
Sur ce dernier point, Prevenge s'approxime à un slasher profondément misanthrope. Alice Lowe n'épargne personne, que ce soit son héroïne principale, mais aussi ses victimes, qui apparaissent toutes - sans exception - comme des êtres esseulés et débonnaires. Vous l'avez donc compris et même probablement subodoré. Prevenge possède de solides arguties dans sa besace. Toutefois, ce slasher perd de sa prégnance et de sa virulence lors de son ultime segmentation. Dommage... Car sans ces quelques atermoiements, Prevenge aurait pu aisément s'immiscer dans le haut du panier. Mais, en l'état, Prevenge reste un slasher tout à fait convenable et recommandable. Ce fim se bonifiera sans doute au fil des années. A suivre...

 

Note : 13/20 

sparklehorse2 Alice In Oliver